crise-politique-au-kenya--le-vice-president-gachagua-face-a-une-destitution-historique

Crise politique au Kenya : Le vice-président Gachagua face à une destitution historique

 • 0 views

Le parlement kenyan a voté en faveur de la destitution du vice-président Rigathi Gachagua, accusé de corruption. Cette décision sans précédent révèle des tensions au sein du gouvernement et soulève des questions sur l'avenir politique du pays.

Le Kenya, pays d'Afrique de l'Est connu pour sa diversité ethnique et sa faune emblématique, traverse actuellement une crise politique majeure. Le 8 octobre 2024, l'Assemblée nationale kenyane a pris une décision sans précédent en votant en faveur de la destitution du vice-président Rigathi Gachagua. Ce vote historique, qui a vu 282 députés sur 349 se prononcer pour la destitution, marque un tournant dans l'histoire politique du pays.

Rigathi Gachagua, âgé de 59 ans, fait face à onze accusations, dont des faits de corruption, d'acquisition illégale de propriétés immobilières et d'hôtels de luxe, ainsi que d'incitation à la division ethnique. Ces allégations surviennent dans un contexte politique tendu, où les relations entre le vice-président et le président William Ruto se sont détériorées au fil du temps.

Le parcours politique de Gachagua est relativement récent. Inconnu du grand public jusqu'en 2017, il a fait son entrée sur la scène politique nationale lors de sa première élection en tant que député. Son ascension rapide l'a conduit à devenir le colistier de William Ruto lors de l'élection présidentielle de 2022, une décision qui a surpris de nombreux observateurs.

La politique kenyane est profondément influencée par les dynamiques ethniques. Le Kenya, qui compte plus de 40 groupes ethniques différents, voit souvent ses alliances politiques se former sur des bases régionales et ethniques. Les Kikuyus, dont fait partie Gachagua, représentent environ 17% de la population et jouent un rôle crucial dans les élections nationales.

Les tensions entre Gachagua et le président Ruto ont atteint leur paroxysme cet été, lors des manifestations contre la loi de finances. Le vice-président a indirectement critiqué la réponse policière, se positionnant du côté du peuple. Cette prise de position a été perçue comme une menace par l'entourage présidentiel.

Le processus de destitution, bien qu'historique, soulève des questions sur la stabilité politique du Kenya. Certains craignent que cette procédure ne déstabilise davantage le gouvernement, tandis que d'autres y voient une opportunité de renforcer la responsabilité des hauts fonctionnaires.

"M. Gachagua n'est pas une personnalité politique de premier plan, que ce soit chez les Kikuyus ou à l'échelle nationale. Sans pouvoir ou influence sur le gouvernement, il va rapidement disparaître."

Gedion Onyango, analyste politique à la London School of Economics (LSE)

La prochaine étape de ce processus sera le vote au Sénat, où 45 voix sur 68 seront nécessaires pour confirmer la destitution. Quelle que soit l'issue, cet épisode marque un tournant dans la jeune démocratie kenyane, qui a obtenu son indépendance en 1963 et adopté sa constitution actuelle en 2010.

Cette crise politique intervient alors que le Kenya fait face à de nombreux défis, notamment économiques et environnementaux. Le pays, qui abrite le plus grand bidonville d'Afrique à Nairobi, doit également composer avec des périodes de sécheresse sévère ces dernières années, mettant en péril son importante production agricole, notamment de thé et de café.

Malgré ces turbulences politiques, le Kenya reste un acteur majeur en Afrique de l'Est, avec la plus grande économie de la région et une capitale, Nairobi, qui s'affirme comme un hub régional. Le pays continue également de briller sur la scène internationale grâce à ses athlètes de fond de classe mondiale et ses avancées technologiques, comme le lancement de son premier satellite en 2018.

L'issue de cette crise politique aura sans doute des répercussions importantes sur l'avenir du Kenya, tant sur le plan national qu'international. Elle pourrait redéfinir les équilibres politiques et ethniques du pays, tout en testant la solidité de ses institutions démocratiques.