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Agression d'un médecin à Marseille : un défi pour les soins de proximité

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Une médecin agressée à Marseille quitte son poste, mettant en lumière les défis des soins dans les quartiers défavorisés. Malgré la condamnation de l'agresseur, le manque de mesures concrètes inquiète.

L'agression d'une médecin dans un cabinet du 15e arrondissement de Marseille a mis en lumière les défis auxquels sont confrontés les professionnels de santé dans les quartiers défavorisés. Le 12 août 2024, la Dr Sara Hambli, 35 ans, a été physiquement agressée par une jeune femme de 19 ans et une mineure de 11 ans après avoir refusé de délivrer une ordonnance sans consultation.

Le 3 octobre 2024, le tribunal judiciaire de Marseille a condamné l'agresseur principale à 24 mois de prison, dont 12 sous bracelet électronique. Cette décision a été affichée à l'entrée du centre médical par le Dr Saïd Ouichou, fondateur du cabinet, dans l'espoir de dissuader de futurs actes de violence.

Cet incident s'inscrit dans un contexte préoccupant d'augmentation des agressions contre le personnel soignant en France. Entre 2021 et 2022, la violence dans les hôpitaux français a connu une hausse alarmante de 23%. Cette situation met en péril l'accès aux soins dans les zones déjà défavorisées, comme le 15e arrondissement de Marseille, l'un des plus pauvres de la deuxième ville de France.

Malgré la mobilisation des élus, des instances ordinales et des habitants, peu de mesures concrètes ont été mises en place pour améliorer la sécurité des praticiens. Le Dr Ouichou a dû installer à ses frais un système d'alerte et de vidéosurveillance. Cette situation illustre les défis auxquels font face les médecins exerçant dans les zones d'intervention prioritaire, mises en place pour lutter contre les déserts médicaux.

Le 17 septembre 2024, la Dr Hambli a annoncé qu'elle ne reprendrait pas son activité à La Viste, envisageant même de quitter Marseille. Cette décision souligne la difficulté de maintenir des soins de proximité dans les quartiers sensibles, alors que la France compte environ 226 000 médecins en activité en 2024, un nombre insuffisant pour couvrir tous les besoins.

Le Dr Ouichou, d'origine marocaine et fort de dix années d'expérience chez SOS-Médecins à Paris, reste déterminé à poursuivre son activité dans ce quartier difficile. Il souligne l'importance d'avoir une "fibre" particulière pour exercer dans ces conditions, tout en déplorant le manque de volontaires pour le rejoindre.

Cette situation met en évidence les limites du système de santé français, pourtant considéré comme l'un des meilleurs au monde. Les Agences Régionales de Santé (ARS), créées en 2010 pour piloter le système de santé au niveau régional, peinent à apporter des solutions concrètes aux problèmes de sécurité et de recrutement dans les zones défavorisées.

Face à ces défis, la France explore de nouvelles pistes, comme le développement de la télémédecine et la suppression du numerus clausus en 2020 pour former davantage de médecins. Cependant, ces mesures mettront du temps à porter leurs fruits, laissant des praticiens comme le Dr Ouichou en première ligne face aux difficultés quotidiennes de l'exercice médical dans les quartiers sensibles.

"Il faut que les gens comprennent qu'agresser un médecin est une chose très grave"

Dr Saïd Ouichou

Cette situation à Marseille illustre un problème national plus large : la nécessité de garantir la sécurité des soignants tout en assurant l'accès aux soins dans les zones défavorisées. Elle soulève également des questions sur l'attractivité de la profession médicale dans ces quartiers et sur les moyens à mettre en œuvre pour soutenir les praticiens qui choisissent d'y exercer.

Nicolette Mathieu

Politique