Au cours des dernières décennies, les centres-villes français ont connu un déclin commercial significatif. Cette situation, mise en lumière par un rapport de l'inspection générale des finances en 2016, a incité l'État à agir. En 2018, soit il y a 6 ans, le gouvernement a lancé le programme national "Cœur de ville", ciblant particulièrement les villes de taille moyenne.
Cette initiative s'est avérée cruciale face à la double menace pesant sur les commerces de proximité : la concurrence des grandes surfaces en périphérie et l'essor du commerce en ligne, ce dernier ayant été accéléré par la crise du Covid-19. Il est intéressant de noter que le concept de centre commercial moderne, qui a contribué à cette situation, a été inventé par l'architecte Victor Gruen dans les années 1950.
Cependant, bien avant l'intervention de l'État, de nombreuses collectivités avaient déjà pris les devants. Dès le début des années 2000, soit il y a près d'un quart de siècle, des initiatives locales moins médiatisées visaient à revitaliser les commerces en centre-ville. Certains y ont vu une volonté de transformer le cœur urbain en "centre commercial à ciel ouvert". Cette approche n'est pas sans rappeler le concept de "retail entertainment", qui vise à créer des expériences uniques pour attirer les consommateurs en magasin.
Au Royaume-Uni, dans les années 1990, des initiatives de "town center management" se sont répandues, visant à réduire le taux de vacance commerciale en attirant les grandes enseignes. Cependant, il est important de souligner que la revitalisation du commerce en centre-ville ne se limite pas à l'implantation de grandes marques au détriment des petits commerces.
Une étude menée dans le cadre de l'ouverture de Reims Commerce révèle la diversité des approches de redynamisation. Ces stratégies s'accompagnent souvent de l'embauche de managers de centre-ville, des experts aux parcours variés mais partageant des objectifs communs : suivi du taux de vacance, engagement auprès des commerçants et artisans, connaissance approfondie du tissu économique local et politique, partenariats avec les associations de commerçants, et attention portée à l'organisation urbaine.
Ces professionnels font face à des défis complexes. Ils doivent travailler avec des contraintes budgétaires strictes et s'adapter à des environnements publics changeants, parfois marqués par des conflits entre différents niveaux de gouvernance. Leur rôle est crucial pour fédérer les services municipaux et simplifier les démarches administratives pour les commerçants.
L'ouverture de "bureaux de commerce" en centre-ville illustre cette volonté de faciliter le contact entre les autorités, les commerçants et leurs clients. Ces espaces deviennent des points nodaux, démontrant le soutien de la ville et de la région aux activités commerciales locales.
Il est intéressant de noter que ces efforts s'inscrivent dans une longue histoire du commerce urbain. La première rue commerçante connue date de l'Empire romain, la Via Sacra à Rome. Aujourd'hui, des concepts modernes comme le "slow shopping", qui encourage une consommation plus réfléchie et locale, ou la "ville du quart d'heure", qui promeut l'accès aux services essentiels à 15 minutes à pied, influencent les stratégies de revitalisation.
Le programme "Action Cœur de Ville", lancé en 2018, concerne 222 villes moyennes en France. Cette initiative s'appuie sur des outils législatifs récents, comme la loi Elan de 2018, qui a introduit de nouveaux moyens pour revitaliser les centres-villes. La première Opération de Revitalisation de Territoire (ORT) a d'ailleurs été signée en 2019 à Rodez.
Face à un taux de vacance commerciale moyen d'environ 12% dans les centres-villes français en 2022, ces efforts de revitalisation sont plus que jamais nécessaires. Ils s'inscrivent dans une dynamique de réinvention du commerce urbain, où l'innovation et l'adaptation aux nouvelles habitudes de consommation jouent un rôle clé.