L'ère des réseaux sociaux, inaugurée il y a 20 ans avec le lancement de Facebook par Mark Zuckerberg en 2004, semble entrer dans une nouvelle phase. Bien que ces plateformes continuent d'attirer des milliards d'utilisateurs quotidiens, leurs habitudes d'utilisation connaissent une transformation significative.
Aujourd'hui, plus de deux milliards de personnes se connectent chaque jour sur Facebook, un milliard chaque mois sur TikTok, et 250 millions quotidiennement sur X (anciennement Twitter). Cependant, ces chiffres impressionnants masquent une évolution subtile mais profonde dans la manière dont ces plateformes sont utilisées.
Adam Mosseri, le directeur d'Instagram, a reconnu l'année dernière que les utilisateurs partagent moins de moments personnels dans le fil d'actualité public, préférant les "stories" éphémères ou les messages privés. Cette tendance est particulièrement marquée chez les adolescents, qui passent la majorité de leur temps dans la messagerie privée de l'application.
Ce changement de paradigme contraste fortement avec les débuts de l'ère des réseaux sociaux. À l'époque, ces plateformes avaient révolutionné nos habitudes en ligne, permettant à chacun de publier facilement du contenu à destination d'un large public. La course aux "likes", introduits sur Facebook en 2009, encourageait le partage public et redéfinissait la notion d'"amis" en ligne.
"Avant, je racontais toute ma vie sur Internet. Je partageais beaucoup de photos en public sur Facebook. J'écrivais 'la flemme d'aller en cours', 'je vais me prendre un café'… Ça a beaucoup changé. Maintenant, je ne publie plus, je n'utilise plus mon vrai nom, on ne peut pas me reconnaître sur ma photo de profil."
Ce témoignage illustre une prise de conscience croissante des implications potentielles des publications en ligne. Les préoccupations concernant la vie privée, l'impact professionnel et l'utilisation des données personnelles ont conduit de nombreux utilisateurs à adopter une approche plus prudente.
La génération plus jeune, représentée par Rayan Hermassi, 19 ans, privilégie également les espaces privés. Il a choisi de ne conserver que Snapchat sur son téléphone, principalement pour sa messagerie privée. Cette application, lancée en 2011, a popularisé le concept de "stories" éphémères en 2013, influençant par la suite d'autres plateformes comme Instagram.
Cette évolution vers des interactions plus privées s'inscrit dans un contexte plus large de remise en question des réseaux sociaux. Le scandale Cambridge Analytica en 2018 a mis en lumière les risques liés à l'utilisation abusive des données personnelles sur Facebook, renforçant la méfiance des utilisateurs.
Malgré ces changements, les réseaux sociaux continuent d'innover et de s'adapter. TikTok, lancé en 2016, est devenu l'application la plus téléchargée au monde en 2020, attirant un public jeune avec son format vidéo court. Instagram a introduit IGTV en 2018 pour concurrencer YouTube, tandis que Facebook a changé son nom en Meta en 2021, signalant son ambition dans le domaine de la réalité virtuelle.
En conclusion, si l'ère des réseaux sociaux n'est pas révolue, elle entre dans une nouvelle phase caractérisée par une utilisation plus réfléchie et privée. Les utilisateurs, plus conscients des enjeux liés à leur présence en ligne, cherchent désormais à créer des espaces d'échange plus intimes et contrôlés au sein de ces vastes plateformes.