Kaïs Saïed : de professeur de droit à président controversé de la Tunisie

Kaïs Saïed, président tunisien, brigue un second mandat. Son parcours atypique, de professeur à chef d'État, et son virage autoritaire soulèvent des questions sur l'avenir démocratique du pays.

5 octobre 2024, 17:18  •  0 vues

Kaïs Saïed : de professeur de droit à président controversé de la Tunisie

Dans un contexte politique tendu, le président tunisien Kaïs Saïed appelle les citoyens à participer massivement à l'élection présidentielle du 6 octobre 2024. Cette échéance cruciale intervient près de cinq ans après son accession surprise au pouvoir en 2019, marquant un tournant dans l'histoire politique du pays.

Kaïs Saïed, né le 22 février 1958 à Tunis, est issu d'une famille de classe moyenne. Son parcours académique l'a mené au prestigieux collège Sadiki, établissement fondé en 1875 et reconnu pour avoir formé de nombreux intellectuels et dirigeants tunisiens. Cette institution a joué un rôle clé dans la formation des élites du pays, qui a obtenu son indépendance de la France en 1956.

Après des études de droit, Saïed a embrassé une carrière universitaire, devenant professeur de droit constitutionnel. Son expertise dans ce domaine s'est avérée cruciale dans un pays qui a connu des changements constitutionnels majeurs, notamment l'adoption d'une nouvelle constitution en 2014, suite à la révolution de 2010-2011 qui a conduit à la chute du président Ben Ali.

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La victoire électorale de Saïed en 2019, avec 72,7% des suffrages au second tour, a surpris de nombreux observateurs. Sans expérience politique préalable, il a su capitaliser sur son image d'intégrité et de probité dans un pays où le taux d'alphabétisation élevé favorise l'engagement civique. Cependant, son mandat a pris un tournant autoritaire le 25 juillet 2021, lorsqu'il s'est arrogé les pleins pouvoirs, suscitant des inquiétudes quant à l'avenir démocratique de la Tunisie.

Il est important de noter que la Tunisie, berceau du Printemps arabe en 2010, a longtemps été considérée comme un modèle de transition démocratique dans le monde arabe. Le pays a été le premier de la région à être classé comme "libre" par Freedom House en 2015, et a été pionnier dans de nombreux domaines, notamment l'abolition de l'esclavage en 1846 et l'interdiction de la polygamie en 1956.

La campagne électorale de Saïed pour sa réélection se déroule dans un climat de tension. Le président sortant met en garde contre ses adversaires, les accusant de conspirer avec des "puissances étrangères". Cette rhétorique contraste avec l'image internationale de la Tunisie, qui a accueilli des événements majeurs comme le sommet de la Francophonie en 2022 et le premier sommet de la Ligue arabe en 1979.

L'avenir politique de la Tunisie est étroitement lié à son développement économique. Le pays, dont le dinar est la monnaie officielle depuis 1958, dépend fortement du tourisme, qui représente environ 14% de son PIB. Les défis économiques persistent malgré les atouts culturels et historiques du pays, comme le site archéologique de Carthage, classé au patrimoine mondial de l'UNESCO.

"C'est un rendez-vous avec l'histoire. Vous ne devez pas hésiter une seule seconde"

Kaïs Saïed lors de son allocution de campagne

Cette élection sera déterminante pour l'avenir de la Tunisie, pays qui a été à l'avant-garde de nombreuses réformes dans le monde arabe, notamment en matière de droits des femmes avec la légalisation de l'avortement dès 1973. Le scrutin du 6 octobre 2024 décidera si le pays poursuivra sur la voie de la démocratie ou s'orientera vers un régime plus autoritaire sous la direction de Kaïs Saïed.