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La santé mentale des mères : un enjeu crucial souvent négligé

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La dépression périnatale, première cause de mortalité maternelle post-accouchement, reste sous-estimée. Des experts s'efforcent d'améliorer la prise en charge, malgré les défis du secteur de la santé mentale.

La période de grossesse et de post-partum est souvent perçue comme un moment de pure joie. Cependant, cette vision idyllique peut masquer une réalité plus sombre. Lucie Joly, psychiatre spécialisée en santé périnatale à l'hôpital Saint-Antoine, souligne l'importance de reconnaître et de traiter la détresse psychologique des futures et nouvelles mères.

Le suicide représente la première cause de mortalité maternelle dans l'année suivant l'accouchement, selon un rapport récent de l'Inserm et de Santé publique France. Sur 272 décès enregistrés entre 2016 et 2018, 45 étaient dus au suicide. Ces chiffres alarmants mettent en lumière l'urgence d'une meilleure prévention et prise en charge.

La dépression périnatale touche environ 10-20% des femmes enceintes ou en post-partum, un fait souvent méconnu. Le cerveau maternel subit des changements structurels et fonctionnels importants pendant la grossesse, ce qui peut contribuer à cette vulnérabilité. De plus, le "baby blues", qui affecte jusqu'à 80% des nouvelles mères dans les jours suivant l'accouchement, peut parfois évoluer vers une dépression plus sérieuse.

Lucie Joly et son collègue Hugo Bottemanne, chercheur en neurosciences, s'efforcent de sensibiliser le public et les professionnels de santé à ces enjeux. Ils ont publié plusieurs ouvrages, dont "Dans le cerveau des mamans" et "La Dépression au féminin", pour mieux comprendre et traiter ces troubles.

: "Très peu d'études se penchent sur le cerveau des mères et sur leur grande vulnérabilité pendant cette période. Comment comprendre la dépression maternelle, les grossesses imaginaires, le syndrome du bébé fantôme, le déni de grossesse ?"

Lucie Joly observe

La psychiatre forme également les sages-femmes et les infirmiers à repérer les troubles psychiques et travaille à la création d'une unité consacrée à la santé mentale féminine. Ces initiatives sont cruciales, car le soutien social est un facteur protecteur important contre la dépression périnatale.

Malheureusement, le secteur de la santé mentale fait face à de nombreux défis : problèmes de financement, manque de personnel, et idées reçues persistantes. Ces obstacles dissuadent souvent les personnes ayant besoin d'aide de consulter un professionnel.

Il est important de noter que des traitements efficaces existent. La thérapie cognitivo-comportementale et la thérapie interpersonnelle ont montré de bons résultats dans le traitement de la dépression périnatale. De plus, des approches comme la méditation et le yoga peuvent aider à réduire le stress et l'anxiété pendant la grossesse.

Le ministère de la santé estime que les troubles psychiques toucheraient près de 13 millions de Français, soit une personne sur cinq. Face à cette prévalence élevée, il est crucial de continuer à sensibiliser, former et améliorer l'accès aux soins en santé mentale, particulièrement pour les femmes enceintes et les nouvelles mères.

Angelique Labbé