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Mayotte : Mutinerie et crise à la prison de Majicavo

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Une violente mutinerie éclate dans la prison surpeuplée de Majicavo à Mayotte. Les gardiens exercent leur droit de retrait, exigeant le transfert des meneurs en métropole face à des conditions de détention alarmantes.

La prison de Majicavo à Mayotte, département français d'outre-mer situé dans l'océan Indien, a été le théâtre d'une violente mutinerie le 28 septembre 2024. Cet incident met en lumière les défis uniques auxquels fait face ce territoire en matière de sécurité et de gestion pénitentiaire.

Des vidéos saisissantes, filmées par les détenus eux-mêmes, ont circulé sur les réseaux sociaux, montrant des scènes de chaos à l'intérieur de l'établissement. On y voit notamment un détenu masqué brandissant une barre de fer, tandis que d'autres jouent au football dans les coursives, célébrant devant les portes ouvertes des cellules.

L'intervention rapide de l'antenne locale du Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN) a permis de mettre fin à la mutinerie en quelques heures. Cependant, les conséquences de cet événement se sont fait sentir bien au-delà de la journée du 28 septembre.

En réaction, les surveillants pénitentiaires ont exercé leur droit de retrait les 29 et 30 septembre, refusant de prendre leur service. Ce droit, crucial pour la protection des travailleurs en cas de danger grave et imminent, souligne la gravité de la situation à Majicavo.

La surpopulation carcérale, problème récurrent en France, atteint des proportions alarmantes dans cet établissement. Avec des taux d'occupation dépassant les 280% dans certaines sections, Majicavo figure parmi les prisons les plus surpeuplées du pays. Cette situation va à l'encontre des normes européennes qui recommandent un espace minimum de 4m² par détenu.

Les conditions de détention sont décrites comme "irréelles" par Vincent Pardoux, représentant syndical. Dans des cellules conçues pour deux personnes, on trouve jusqu'à cinq détenus, dont certains dorment sur des matelas au sol. Ces conditions déplorables ont des répercussions graves sur la santé mentale des détenus et augmentent les risques de violence.

L'établissement, ouvert en 2014, souffre d'un sous-dimensionnement chronique face à l'augmentation constante de la population carcérale. Chaque année, environ cent nouveaux détenus s'ajoutent, principalement en raison d'affaires de violence avec armes. Cette surpopulation entraîne une "embolisation de tous les services", comme le souligne Nicolas Jauniaux, chef d'établissement.

Les conséquences de cette surpopulation sont multiples : accès limité aux activités sportives et éducatives, difficultés d'accès aux soins médicaux, et opportunités de travail réduites pour les détenus. Ces facteurs compromettent sérieusement les efforts de réinsertion, pourtant cruciaux pour prévenir la récidive.

Face à cette crise, les gardiens exigent le transfert des meneurs de la mutinerie vers la métropole. Cette pratique, courante entre l'outre-mer et la France continentale, soulève des questions sur la gestion à long terme des problèmes pénitentiaires à Mayotte.

La situation à Majicavo illustre les défis plus larges auxquels est confronté le système carcéral français, régulièrement critiqué par les organismes de défense des droits de l'homme. Elle met en lumière la nécessité urgente de réformes pour améliorer les conditions de détention, renforcer la sécurité, et favoriser une réinsertion efficace des détenus.

"Cet établissement, ouvert en 2014, a été sous-dimensionné et a vieilli prématurément en raison de la surpopulation carcérale. Les conditions de détention sont irréelles. Depuis plusieurs semaines, des détenus se plaignaient de problèmes d'eau, d'électricité et d'évacuation sanitaire."

Déclaration de Vincent Pardoux, secrétaire régional FO Justice pour La Réunion et Mayotte

La crise à Majicavo souligne l'urgence d'une action concertée pour résoudre les problèmes structurels du système pénitentiaire, non seulement à Mayotte, mais dans l'ensemble du territoire français. Elle rappelle que le respect des droits fondamentaux et la dignité humaine doivent rester au cœur des politiques pénitentiaires, même dans les contextes les plus difficiles.

Angelique Labbé

Politique