Au cœur de la Florence médiévale, une scène emblématique se déroule devant le palais du Podestat : la distribution de nourriture aux indigents. Cette image, tirée du manuscrit du Domenico Lenzi, marchand d'avoine du XIVe siècle, illustre parfaitement la complexité de la vie urbaine de l'époque.
Entre le Ve et le XVe siècle, les flux migratoires faisaient partie intégrante du quotidien des cités. Loin d'être perçus comme une anomalie, ils étaient considérés comme un signe de vitalité économique. Cette réalité est mise en lumière par un témoignage poignant de 1428, provenant de l'Oisans, une région montagneuse des Alpes françaises. Face à une pénurie de blé, les habitants déplorent : « Aucun étranger ne vient y demeurer et de jour en jour les habitants quittent la paroisse ».
Les villes médiévales, telles que Florence, étaient des carrefours dynamiques où les populations circulaient constamment. Ces mouvements étaient influencés par divers facteurs : les saisons, les événements familiaux comme les mariages ou les veuvages, la conjoncture économique, et les conditions sanitaires ou militaires. Par exemple, la Peste Noire de 1347-1351 a provoqué des déplacements massifs, tout comme la Guerre de Cent Ans (1337-1453).
L'étude de ces migrations passionne les historiens depuis longtemps. En 1980, Claudine Billot et Arlette Higounet-Nadal ont créé l'une des premières bases de données informatisées sur le sujet, utilisant plus de 10 000 cartes perforées. Cette initiative pionnière a ouvert la voie à des recherches plus approfondies sur les causes et les conséquences de ces mouvements de population.
La croissance des villes occidentales entre le XIe et le XVe siècle est un phénomène majeur de cette période. Florence, en particulier, a connu un essor remarquable, devenant un centre économique et culturel important. Le développement de la banque florentine a favorisé les échanges et attiré de nombreux migrants. De même, la construction de cathédrales gothiques et l'essor de l'industrie textile ont créé des opportunités d'emploi pour les artisans et les ouvriers.
Les universités médiévales, comme la Sorbonne fondée en 1257, ont également joué un rôle crucial dans les migrations, attirant des étudiants de toute l'Europe. Les pèlerinages, forme importante de migration temporaire, ont contribué à la circulation des idées et des cultures.
Il est important de noter que ces mouvements n'étaient pas toujours volontaires. Les Juifs, par exemple, ont subi de nombreuses expulsions des villes européennes au cours du Moyen Âge. De même, les famines récurrentes, comme la Grande Famine de 1315-1317, ont provoqué des exodes ruraux importants.
L'intérêt pour ces questions migratoires perdure. Des cartes perforées des années 1980 à l'Atlas des migrations en Méditerranée récemment publié, les chercheurs continuent d'explorer ce pan essentiel de l'histoire urbaine médiévale. Ces études nous rappellent que la mobilité des populations a toujours été un facteur clé dans le développement et la transformation des sociétés.