Couvreurs en péril : le défi de la sécurité sur les toits français

Les couvreurs français font face à des risques élevés de chutes. Malgré des progrès, les petites entreprises peinent à assurer la sécurité. Une étude récente met en lumière ces défis persistants.

7 octobre 2024, 04:14  •  63 vues

Couvreurs en péril : le défi de la sécurité sur les toits français

Depuis deux décennies, Michel Bianco documente la réalité périlleuse des travailleurs sur les toits de sa région. Ses photographies révèlent une vérité alarmante : de nombreux couvreurs exercent leur métier sans protection adéquate, souvent dans des conditions précaires. Cette pratique dangereuse s'inscrit dans une longue histoire, car le métier de couvreur existe depuis l'Antiquité, où les premiers toits étaient faits de matériaux naturels comme le chaume ou les feuilles de palmier.

Le 2 août 2006, la tragédie a frappé la famille Bianco lorsque Jérôme, le fils de Michel, a perdu la vie en chutant d'un échafaudage lors de l'installation d'une baie vitrée. Cet incident tragique illustre les risques inhérents à ce métier, qui remonte au Moyen Âge où les couvreurs formaient déjà une guilde importante.

Les statistiques récentes sont tout aussi préoccupantes. En 2022, entre 17% et 19% des 738 décès de salariés du secteur privé étaient dus à des chutes de hauteur. Sébastien Terrier, de l'Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPPBTP), souligne que 43% des accidents graves et mortels chez les couvreurs sont causés par ces chutes.

Le métier de couvreur, qui consiste à réaliser, réparer et entretenir les toits, comporte des risques multiples. Les couvreurs travaillent avec divers matériaux, des tuiles en terre cuite utilisées depuis plus de 5000 ans aux panneaux solaires devenus courants depuis les années 2010. Ils sont exposés aux intempéries et doivent s'adapter à des configurations de toits uniques, ce qui multiplie les dangers.

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Bien que les normes de sécurité se soient renforcées au fil du temps - les premiers harnais de sécurité ayant été introduits dans les années 1930 - les petites entreprises, qui représentent plus de 90% des employeurs en couverture, peinent souvent à les mettre en œuvre par manque de temps et de ressources.

Cyril Guy, chef d'entreprise en Dordogne, insiste sur l'importance du confort de travail :

"Quand il y a un confort de travail, on gagne de l'argent. Mais le client ne voit pas toujours l'intérêt de mettre en sécurité les couvreurs."

Cyril Guy, chef d'entreprise en Dordogne

Cette réalité économique se heurte aux impératifs de sécurité, d'autant plus que les chantiers de couverture sont souvent de courte durée. Frédéric Mau, président de l'OPPBTP, souligne la nécessité d'impliquer davantage les maîtres d'ouvrage dans la responsabilité juridique en cas d'accident.

Malgré ces défis, des progrès ont été réalisés. Entre 2016 et 2021, le nombre d'accidents pour mille salariés a presque été divisé par deux. Cependant, la route vers une sécurité optimale reste longue. L'utilisation croissante de technologies modernes, comme les drones pour l'inspection des toits, pourrait contribuer à réduire les risques.

En conclusion, le métier de couvreur, essentiel à notre habitat depuis des millénaires, se trouve à la croisée des chemins entre tradition et modernité, entre risques professionnels et impératifs de sécurité. L'avenir de cette profession dépendra de sa capacité à intégrer les nouvelles technologies et à faire évoluer les mentalités, tant des professionnels que des clients, pour garantir la sécurité de ceux qui veillent sur nos toits.