Procès d'un médecin rwandais accusé de génocide s'ouvre à Paris

Eugène Rwamucyo, 65 ans, comparaît pour génocide et crimes contre l'humanité commis au Rwanda en 1994. Le procès, impliquant 750 parties civiles, débute à Paris, soulignant l'application de la compétence universelle.

1 octobre 2024, 05:13  •  30 vues

Procès d'un médecin rwandais accusé de génocide s'ouvre à Paris

Le procès d'Eugène Rwamucyo, un médecin rwandais de 65 ans, s'ouvre aujourd'hui à Paris. Accusé de génocide et de crimes contre l'humanité commis au Rwanda en 1994, il fait face à des charges graves liées à son rôle présumé dans les événements tragiques qui ont coûté la vie à entre 500 000 et 1 million de personnes en seulement 100 jours.

L'affaire, qui se déroule en France en vertu du principe de compétence universelle, met en lumière les efforts continus pour traduire en justice les responsables présumés du génocide rwandais, même 30 ans après les faits. Ce principe juridique permet aux États de poursuivre certains crimes graves, indépendamment du lieu où ils ont été commis.

Rwamucyo est accusé d'avoir participé à des réunions incitant à la haine contre les Tutsi et d'avoir été impliqué dans l'enfouissement de corps à Butare, une ville connue comme un important centre intellectuel au Rwanda. Ces accusations s'inscrivent dans le contexte plus large du génocide qui a principalement visé la minorité tutsi et les Hutu modérés.

Le parcours de l'accusé est marqué par son implication dans le Mouvement révolutionnaire national pour le développement (MRND), le parti unique au Rwanda de 1975 à 1991, et ses liens présumés avec des figures clés de la propagande génocidaire, notamment les fondateurs de la Radio-Télévision Libre des Mille Collines (RTLM), qui a joué un rôle majeur dans l'incitation au génocide.

Après avoir fui le Rwanda en juin 1994, Rwamucyo a transité par plusieurs pays africains avant d'arriver en France en décembre 1999. Sa demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) a été rejetée, mais il a néanmoins obtenu un titre de séjour temporaire.

Le procès, qui devrait durer jusqu'au 29 octobre, implique 750 parties civiles, dont le Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR), la Ligue des droits de l'homme et la Ligue internationale contre le racisme et l'antisémitisme (Licra). Cette mobilisation importante témoigne de l'impact durable du génocide et de la quête de justice des survivants et de leurs familles.

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Il est important de noter que le système judiciaire rwandais post-génocide a connu des évolutions significatives, notamment avec l'introduction des tribunaux Gacaca, une forme de justice traditionnelle adaptée pour traiter le grand nombre de cas liés au génocide. De plus, le Rwanda a aboli la peine de mort en 2007, une décision importante dans le contexte des poursuites judiciaires liées au génocide.

Le procès de Rwamucyo s'inscrit dans une série d'actions judiciaires visant à établir la responsabilité des individus impliqués dans le génocide rwandais. Il rappelle que la quête de justice pour les crimes contre l'humanité ne connaît pas de frontières et que la communauté internationale reste engagée dans la poursuite des responsables présumés, même des décennies après les faits.

"Je crains que ce procès ne se déroule dans de mauvaises conditions après une instruction qui aura duré quinze années. Mais nous allons montrer que les accusations portées contre mon client sont uniquement liées aux fonctions qu'il exerçait en tant que médecin."

Déclaration de Me Philippe Meilhac, avocat d'Eugène Rwamucyo

Alors que le procès débute, il convient de rappeler que le génocide rwandais reste l'une des pages les plus sombres de l'histoire récente, ayant profondément marqué non seulement le Rwanda mais aussi la conscience collective mondiale. L'issue de ce procès sera suivie de près par de nombreux observateurs, tant pour ses implications juridiques que pour son importance historique dans le processus de guérison et de réconciliation du Rwanda.