La France envisage une taxe sur les rachats d'actions des grandes entreprises

Le gouvernement français étudie une taxation des rachats d'actions pour réduire le déficit public. Cette mesure, inspirée des États-Unis, ciblerait les grandes entreprises et pourrait rapporter environ 200 millions d'euros par an.

7 octobre 2024, 08:13  •  30 vues

La France envisage une taxe sur les rachats d'actions des grandes entreprises

Dans un effort pour maîtriser le déficit public, le gouvernement français examine actuellement la possibilité d'instaurer une taxe sur les rachats d'actions. Cette mesure, discutée lors d'une réunion interministérielle il y a environ deux semaines, a été soumise au Conseil d'État pour validation.

Cette initiative s'inspire d'une pratique courante à Wall Street, où le gouvernement de Joe Biden a mis en place une taxation similaire en janvier 2023. Aux États-Unis, les rachats d'actions ont atteint un montant record de 932,4 milliards de dollars en 2022, soit environ 850 milliards d'euros.

En France, bien que cette pratique gagne en popularité, les montants restent plus modestes. En 2023, les entreprises du CAC 40 ont établi un nouveau record avec 30,1 milliards d'euros de rachats d'actions. TotalEnergies, qui a réalisé les bénéfices les plus importants cette année-là, a effectué près d'un tiers du total des rachats en France, soit 9,2 milliards d'euros.

Le rachat d'actions est une stratégie financière par laquelle une entreprise cotée en bourse acquiert ses propres actions pour les retirer du marché. Cette pratique, légalisée aux États-Unis en 1982 et en France en 1998, permet aux entreprises de redistribuer des fonds aux actionnaires, à l'instar des dividendes. Cependant, contrairement aux dividendes taxés à 30% par le prélèvement forfaitaire unique, les rachats d'actions échappent actuellement à l'impôt en France.

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Prenons l'exemple de L'Oréal, l'une des plus grandes entreprises françaises et leader mondial des cosmétiques. En 2023, la société a réalisé 6,2 milliards d'euros de profit et a consacré 500 millions d'euros au rachat de ses propres actions. Cette pratique permet de réduire le nombre d'actions en circulation, augmentant ainsi la valeur des actions restantes et potentiellement les dividendes par action.

La taxe envisagée par le gouvernement français diffère du modèle américain. Alors que les États-Unis appliquent une taxe de 1% sur la valeur réelle des rachats, la France prévoit de prélever 8% sur la valeur nominale des actions rachetées. Cette approche pourrait limiter les recettes fiscales, estimées à environ 200 millions d'euros par an.

Cette initiative a suscité des débats politiques. En mars 2023, le président Emmanuel Macron avait dénoncé le "cynisme" des rachats d'actions. Plus récemment, l'ancien Premier ministre Gabriel Attal et son successeur Michel Barnier ont critiqué cette pratique, arguant qu'elle se fait au détriment de l'investissement et des augmentations de salaires.

"Cette pratique ne vise pas seulement à rémunérer indirectement les actionnaires. En augmentant la valeur de l'action, elle permet également de protéger la société d'un rachat hostile par d'autres entreprises."

Jérôme Giannesini, avocat fiscaliste au cabinet Grimaldi Alliance

Il est important de noter que cette taxe ne s'appliquerait qu'aux groupes dépassant le milliard d'euros de chiffre d'affaires et présents sur les places boursières, épargnant ainsi les petites et moyennes entreprises.

Alors que le débat se poursuit, il reste à voir comment cette mesure, si elle est adoptée, affectera les stratégies financières des grandes entreprises françaises et si elle atteindra son objectif de réduction du déficit public.