Djihadistes français en Irak : conditions de détention alarmantes

Treize Français, condamnés pour terrorisme, sont détenus dans des conditions inhumaines en Irak. Leurs avocats dénoncent la surpopulation et l'insalubrité, demandant leur rapatriement.

7 octobre 2024, 03:37  •  0 vues

Djihadistes français en Irak : conditions de détention alarmantes

Treize ressortissants français, dont onze hommes et deux femmes, sont actuellement incarcérés dans les prisons irakiennes pour leur implication dans des activités terroristes. Ces détenus, anciens membres de l'organisation État islamique (EI), font face à des conditions de détention alarmantes, selon les rapports récents de leurs avocats.

Les hommes ont été arrêtés en Syrie en mars 2019, lors de la bataille de Baghouz qui a marqué la fin territoriale de l'EI. Ils ont ensuite été transférés en Irak dans le cadre d'un accord controversé entre Paris et Bagdad. Les femmes, quant à elles, ont été appréhendées par l'armée irakienne pendant la bataille de Mossoul, qui s'est déroulée d'octobre 2016 à juillet 2017.

Les procès de ces djihadistes français ont suscité de vives critiques. En mai et juin 2019, les hommes ont été jugés en seulement trente minutes, sans avocat ni traducteur, et condamnés à mort. Ces sentences ont finalement été commuées en peines de prison à vie en juin 2023 par la Cour suprême fédérale d'Irak. Il est important de noter que l'Irak a aboli la peine de mort en 2003, mais l'a réinstaurée en 2004, exécutant plus de 100 personnes en 2022 selon Amnesty International.

La majorité des détenus français sont incarcérés à la prison d'Al-Russafa à Bagdad, construite dans les années 1960. Les conditions de détention y sont décrites comme épouvantables par quatre avocats français qui ont pu visiter leurs clients à deux reprises au cours des douze derniers mois. Leurs rapports, consultés par Le Monde, dressent un tableau alarmant de la situation.

Dans la section masculine de la prison, les avocats ont constaté une surpopulation extrême. Une cellule de 100 mètres carrés abrite entre 108 et 123 prisonniers, rendant impossible de s'asseoir tous ensemble. Les détenus dorment sur des matelas sales à même le sol, contraints de se serrer pour pouvoir s'allonger. Le système de climatisation défectueux n'a pas été remplacé, malgré les demandes des gardiens aux prisonniers de se cotiser pour en acheter un nouveau.

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Ces conditions de détention violent les normes internationales et les droits humains fondamentaux. L'Irak a pourtant ratifié la Convention contre la torture en 2011, s'engageant à améliorer les conditions carcérales. Cependant, l'ONU a critiqué à plusieurs reprises les conditions de détention dans le pays.

La situation des détenus français soulève des questions sur la politique de non-rapatriement systématique de la France concernant les djihadistes. Bien que la France ait rapatrié certains enfants de djihadistes depuis 2019, la position du gouvernement concernant les adultes reste ferme. Cette politique est en contradiction avec le droit international qui interdit le transfert de prisonniers vers des pays pratiquant la torture.

Les avocats des détenus français demandent leur rapatriement afin qu'ils puissent purger leur peine en France, où le Code pénal punit le terrorisme de 30 ans de réclusion. Cette requête s'inscrit dans un contexte plus large de débat sur le traitement des combattants étrangers de l'EI, dont l'ONU estime qu'ils étaient jusqu'à 40 000 en Syrie et en Irak.

"Nous ne contestons pas l'équité de ces procès qui se sont tenus dans de bonnes conditions avec une défense présente."

Sibeth Ndiaye, porte-parole du gouvernement français en 2019

Cette déclaration contraste fortement avec les témoignages des avocats et des détenus eux-mêmes, qui ont fait état de torture et de procès expéditifs. La France, qui a une convention d'entraide judiciaire avec l'Irak depuis 1981, se trouve dans une position délicate, devant concilier ses engagements internationaux avec sa politique antiterroriste.

La situation des djihadistes français en Irak met en lumière les défis complexes liés à la gestion des combattants terroristes étrangers et soulève des questions cruciales sur les droits humains, la justice internationale et la responsabilité des États dans le traitement de leurs ressortissants accusés de terrorisme.