L'industrie automobile allemande, pilier de l'économie du pays, traverse une période tumultueuse. Volkswagen, BMW et Daimler, les géants du secteur, font face à des défis sans précédent, entraînant dans leur sillage les équipementiers qui constituent l'épine dorsale de cette industrie.
Au cours du premier semestre 2024, vingt entreprises du secteur automobile, chacune réalisant un chiffre d'affaires annuel supérieur à 10 millions d'euros, ont déposé le bilan. Ce chiffre alarmant représente presque le double des faillites enregistrées sur la même période en 2023. Selon une étude du cabinet FalkenSteg, ces faillites menacent plus de 10 000 emplois.
Jonas Eckhardt, expert chez FalkenSteg, prévoit une situation encore plus sombre pour l'année 2024 : « Je table sur 60 dépôts de bilan d'ampleur en 2024, contre 34 en 2023 », a-t-il déclaré au quotidien Bild le 23 septembre.
Les causes de cette crise sont multiples. La baisse de la production automobile, notamment due à la chute des ventes en Chine, pèse lourdement sur l'activité des équipementiers. Ces derniers, qui réalisent leur marge sur les volumes, se trouvent dans une situation précaire. De plus, la transition vers l'électrique nécessite des investissements coûteux, financés par les profits du moteur thermique, un modèle économique mis à mal par la baisse de la demande.
Une étude de l'institut économique de Cologne, publiée le 22 septembre, révèle que la production automobile allemande en 2023 est tombée à son niveau des années 1980. Depuis 2018, elle a diminué d'un quart. Les exportations, quant à elles, sont revenues à leur valeur de 1998.
L'industrie automobile allemande, qui représente environ 5% du PIB du pays, est fortement dépendante des exportations. En effet, 75% des véhicules fabriqués en Allemagne sont destinés à l'étranger, principalement vers l'Asie et la Chine. Cette dernière est devenue le centre de gravité de l'automobile mondiale, absorbant près de la moitié des véhicules produits dans le monde en 2023.
Les surcapacités dans les usines allemandes sont un autre symptôme de cette crise. En 2023, sur les vingt plus grands sites de production, seule la moitié fonctionnait à plus de 68% de leurs capacités. L'usine de Wolfsburg, la plus grande du pays, n'affichait qu'un taux d'utilisation de 56%, produisant moins de 500 000 Volkswagen.
Face à ces défis, l'Allemagne a pris des mesures pour soutenir son industrie automobile. Le pays a fixé l'objectif ambitieux de 15 millions de voitures électriques sur ses routes d'ici 2030 et a investi plus de 40 milliards d'euros dans la mobilité électrique entre 2019 et 2023. De plus, l'Allemagne compte déjà plus de 60 000 bornes de recharge pour véhicules électriques.
Malgré ces efforts, l'avenir de l'industrie automobile allemande reste incertain. Comme le souligne le rapport de l'institut économique de Cologne : « Sans une augmentation sensible de la production, les surcapacités existantes en Allemagne vont devenir un risque économique ». L'adaptation à cette nouvelle réalité sera cruciale pour la survie et la prospérité future de ce secteur historiquement vital pour l'économie allemande.