Le gouvernement camerounais a pris une mesure drastique en interdisant formellement aux médias de discuter de l'état de santé du président Paul Biya. Cette décision intervient dans un contexte de spéculations croissantes sur la condition du chef d'État, âgé de 91 ans, qui n'a pas fait d'apparition publique depuis début septembre 2024.
Une note ministérielle, datée du 9 octobre 2024, a été adressée aux gouverneurs régionaux, stipulant que tout débat sur la santé du président est désormais considéré comme une question de sécurité nationale. Le ministre de l'administration territoriale, Paul Atanga Nji, a signé ce document qui menace de sanctions légales les contrevenants à cette interdiction.
Paul Biya, né le 13 février 1933 à Mvomeka'a, dirige le Cameroun depuis plus de 41 ans, faisant de lui le plus ancien dirigeant élu en exercice. Son parcours politique a débuté bien avant sa présidence, ayant occupé divers postes gouvernementaux. Il est devenu président le 6 novembre 1982 et a survécu à une tentative de coup d'État en 1984.
Le gouvernement a ordonné la création de cellules de veille pour surveiller les médias privés et les réseaux sociaux, afin d'identifier toute personne faisant des commentaires jugés tendancieux sur l'état du président. Cette mesure soulève des inquiétudes quant à la liberté d'expression dans le pays.
L'absence prolongée de Biya a alimenté des rumeurs sur son état de santé. Il n'a pas participé à des événements internationaux importants, comme l'Assemblée générale de l'ONU et le Sommet de la francophonie en octobre 2024. La présidence a tenté de rassurer en affirmant que le président "travaille et vaque à ses occupations à Genève".
Au cours de son long règne, Biya a introduit le multipartisme en 1990 et a remporté sept élections présidentielles. Son parti, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC), domine la scène politique. Cependant, son administration a été marquée par des accusations de corruption et de violations des droits de l'homme.
Le président camerounais est connu pour ses longs séjours à l'étranger, notamment en Suisse, ce qui lui a valu des critiques. Ses détracteurs l'accusent de gouverner à distance, négligeant les défis sécuritaires, économiques et sociaux du pays, notamment la crise anglophone qui sévit depuis 2016.
Malgré les controverses, Biya a reçu plusieurs distinctions internationales et a présidé l'Organisation de l'unité africaine (aujourd'hui Union africaine) en 1996. Son influence sur la scène africaine reste significative, bien que son style de gouvernance discret lui ait valu le surnom de "Le Sphinx".
"Le chef de l'État se porte bien et rejoindra le Cameroun dans les prochains jours."
Cette interdiction de débattre de la santé du président soulève des questions sur la transparence du gouvernement et le droit du public à l'information. Elle met en lumière les défis de la gouvernance au Cameroun et les tensions entre le pouvoir en place et les aspirations démocratiques de la population.