Report du règlement anti-déforestation de l'UE : les écologistes s'alarment

La Commission européenne propose de retarder d'un an l'application du règlement sur la déforestation importée, suscitant l'inquiétude des associations environnementales. Ce report intervient dans un contexte de tensions internationales.

2 octobre 2024, 18:30  •  0 vues

Report du règlement anti-déforestation de l'UE : les écologistes s'alarment

La Commission européenne a proposé le 2 octobre 2024 de reporter d'un an la mise en œuvre du règlement sur la déforestation importée, provoquant une vive réaction des associations de protection de l'environnement. Ce règlement, considéré comme un élément clé du pacte vert européen, vise à interdire l'importation et l'exportation de produits issus de la déforestation.

Boris Patentreger, directeur France de l'ONG Mighty Earth, a exprimé son inquiétude :

"Reculer sur une telle loi en pleine saison des feux en Amazonie est un très mauvais signal. La Commission a cédé face aux lobbies."

Réaction de Boris Patentreger

L'Amazonie, la plus grande forêt tropicale du monde couvrant environ 5,5 millions de km², est particulièrement menacée par la déforestation. Le Brésil a déjà perdu plus de 18% de sa couverture forestière amazonienne depuis 1970.

Le règlement, adopté en 2023, devait initialement entrer en vigueur le 30 décembre 2024. Il concerne une série de produits tels que le cacao, le café, le soja, l'huile de palme, le bois, la viande bovine, le caoutchouc et le cuir. Ces produits sont souvent liés à la déforestation, qui contribue à environ 15% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.

Le système de traçabilité prévu par le règlement exige que les entreprises garantissent que leurs produits ne sont pas associés à des parcelles déboisées après le 31 décembre 2020. Cette approche s'appuie sur l'utilisation de données de géolocalisation et d'images satellitaires, la télédétection par satellite étant un outil clé pour surveiller la déforestation à grande échelle.

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La décision de Bruxelles intervient dans un contexte de tensions internationales. De nombreux pays, dont l'Indonésie, le Brésil, la Côte d'Ivoire, les États-Unis, l'Argentine et la Bolivie, ont exhorté à suspendre l'application du texte, le jugeant trop complexe et flou. Le Brésil, par exemple, a critiqué ce qu'il considère comme "un instrument unilatéral et punitif" allant à l'encontre du "principe de souveraineté".

Au sein de l'Union européenne, l'Autriche, soutenue par une vingtaine d'États, avait demandé en mars 2024 une "révision ciblée" du texte et une prolongation "considérable" de la période de mise en œuvre. Plusieurs secteurs économiques, notamment l'agroalimentaire, l'élevage, le commerce et le bois, ont également exprimé leurs préoccupations.

La nouvelle proposition de la Commission vise à repousser l'entrée en vigueur au 30 décembre 2025 pour les grandes entreprises et au 30 juin 2026 pour les petites et très petites entreprises. Cette décision soulève des questions sur l'engagement de l'UE dans la lutte contre la déforestation, alors que l'Union est à l'origine d'environ 16% de la déforestation liée au commerce mondial.

Il est important de noter que la déforestation a un impact majeur sur la biodiversité et les moyens de subsistance de millions de personnes dépendantes des forêts. De plus, les forêts jouent un rôle crucial dans l'absorption du dioxyde de carbone, captant environ 2,6 milliards de tonnes chaque année.

Face à ces défis, des solutions comme l'agroforesterie, qui combine agriculture et foresterie, et la certification FSC pour les produits forestiers gérés de manière durable, offrent des perspectives pour une utilisation plus durable des terres. La reforestation et la restauration des forêts sont également des stratégies clés reconnues par l'accord de Paris sur le climat pour lutter contre le changement climatique.