Réindustrialisation française : Le rapport controversé d'Olivier Lluansi

Olivier Lluansi remet en question la stratégie industrielle française dans un rapport non publié. Il critique l'objectif de 15% du PIB pour l'industrie en 2035 et plaide pour une approche centrée sur les territoires.

4 octobre 2024, 15:02  •  16 vues

Réindustrialisation française : Le rapport controversé d'Olivier Lluansi

Dans un contexte de débat sur l'avenir industriel de la France, Olivier Lluansi, ancien conseiller de François Hollande et enseignant à l'École des Mines de Paris, a récemment achevé une mission cruciale sur la réindustrialisation du pays. Son rapport, remis en avril 2024, n'a pas été rendu public, suscitant des interrogations sur les orientations stratégiques actuelles.

La France, 7e puissance industrielle mondiale en 2024, fait face à des défis majeurs dans son secteur industriel. Alors que l'industrie représentait 30% du PIB français en 1970, sa part a considérablement diminué, stagnant autour de 10% depuis près de quinze ans. Cette désindustrialisation a entraîné la perte de 2,2 millions d'emplois industriels entre 1980 et 2020, un chiffre alarmant qui souligne l'urgence d'une action efficace.

Lluansi remet en question l'objectif gouvernemental d'atteindre 15% du PIB pour l'industrie d'ici 2035, le jugeant "ni réaliste, ni fondé". Il critique également l'approche actuelle qui, selon lui, favorise excessivement les technologies de rupture et les gigafactories au détriment du "potentiel caché des territoires" et du tissu industriel existant.

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L'expert souligne que la France a longtemps privilégié les services au détriment de l'industrie, contrairement à l'Allemagne qui a maintenu une part industrielle d'environ 20% dans son PIB depuis 2000. Il argue que deux tiers de la réindustrialisation devraient provenir de la base, du tissu industriel existant, plutôt que de miser uniquement sur l'export, les investissements étrangers et les ruptures technologiques.

"On a stoppé nos politiques industrielles à partir de 1975, après le choc pétrolier, pour basculer dans un modèle économique qui favorise les services. On a continué après les années 1990 alors qu'en Europe l'Allemagne pariait sur l'industrie comme moteur de sa réunification."

Olivier Lluansi explique :

Malgré les défis, la France dispose d'atouts considérables. Elle compte environ 250 000 entreprises industrielles en 2024, employant près de 3 millions de personnes. Les secteurs de l'agroalimentaire, de l'automobile et de l'aéronautique sont particulièrement dynamiques. De plus, la France est le 2e producteur agricole de l'Union européenne et le 4e exportateur mondial de produits pharmaceutiques.

Le plan "France 2030" prévoit 54 milliards d'euros d'investissements dans l'industrie, témoignant d'une volonté politique de relance. La France compte également 136 pôles de compétitivité et investit massivement dans la R&D, se classant 3e pays européen en termes de dépôts de brevets.

L'industrie 4.0 ou "usine du futur" est une priorité nationale depuis 2015, et la France vise la neutralité carbone de son industrie d'ici 2050. Ces objectifs ambitieux s'accompagnent de défis environnementaux, l'industrie française émettant environ 20% des émissions de CO2 du pays.

Le rapport de Lluansi, bien que non publié, soulève des questions cruciales sur l'avenir industriel de la France. Il appelle à une réflexion approfondie sur les stratégies à adopter pour revitaliser le secteur industriel français, en tenant compte des spécificités territoriales et du potentiel existant.