Nihon Hidankyo : Le Nobel de la paix honore les survivants atomiques
L'organisation japonaise des survivants des bombardements atomiques, Nihon Hidankyo, reçoit le prix Nobel de la paix. Cette reconnaissance souligne l'importance de leurs témoignages pour un monde sans armes nucléaires.
Dans un contexte mondial de tensions croissantes et de menace nucléaire ravivée, le comité Nobel norvégien a décerné le prix Nobel de la paix 2024 à Nihon Hidankyo, la principale organisation japonaise de survivants des bombardements atomiques de 1945. Cette décision historique intervient 79 ans après les tragédies d'Hiroshima et Nagasaki, les seules villes à avoir subi des attaques nucléaires en temps de guerre.
Le comité a salué les efforts inlassables de Nihon Hidankyo "pour parvenir à un monde exempt d'armes nucléaires et pour avoir démontré par des témoignages que les armes nucléaires ne doivent plus jamais être utilisées". Cette reconnaissance souligne l'importance cruciale des récits des hibakushas, terme japonais désignant les survivants des bombardements, dont l'âge moyen dépasse aujourd'hui les 80 ans.
La réaction émue de Toshiyuki Mimaki, membre de Nihon Hidankyo, témoigne de l'impact profond de cette annonce :
"C'est un rêve dans un rêve. Je n'arrive pas à y croire."
Cette reconnaissance intervient alors que l'horloge de la fin du monde, symbole créé en 1947 pour illustrer la proximité d'une catastrophe planétaire, indique un niveau d'alerte élevé.
Fondée en 1956, Nihon Hidankyo a joué un rôle crucial dans le mouvement pacifiste japonais. Sa création a suivi l'incident du Daigo Fukuryu Maru en 1954, qui a catalysé le mouvement antinucléaire au Japon. L'organisation a constamment œuvré pour prévenir la répétition des tragédies d'Hiroshima et Nagasaki, où les bombes "Little Boy" et "Fat Man" ont causé des destructions sans précédent.
Le prix Nobel de la paix, créé par Alfred Nobel en 1895, est le seul décerné à Oslo plutôt qu'à Stockholm. Cette distinction marque la deuxième fois que le Japon reçoit ce prestigieux prix, après celui attribué en 1974 à l'ancien Premier ministre Eisaku Sato, qui avait établi les trois principes non nucléaires du Japon en 1967.
L'action de Nihon Hidankyo s'inscrit dans un contexte plus large d'efforts internationaux pour le désarmement. Le Japon, signataire du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP) entré en vigueur en 1970, a également signé le Traité sur l'interdiction des armes nucléaires en 2017. Cependant, le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires n'est toujours pas en vigueur en 2024, soulignant l'importance continue du travail de sensibilisation.
Les témoignages des hibakushas, préservés et diffusés par Nihon Hidankyo, sont d'une importance capitale pour l'éducation des générations futures. Le "Dôme de la bombe atomique" à Hiroshima, inscrit au patrimoine mondial de l'UNESCO, et les commémorations annuelles des 6 et 9 août, servent de rappels tangibles de l'horreur nucléaire.
Ce prix Nobel de la paix renforce le concept de "paix positive" développé par Johan Galtung, soulignant l'importance de créer des conditions durables pour la paix, au-delà de la simple absence de conflit. Il rappelle également le rôle crucial du Comité international de la Croix-Rouge, qui fut le premier à alerter sur les effets à long terme des radiations.
Alors que le Bulletin of the Atomic Scientists continue d'évaluer les risques nucléaires mondiaux, la reconnaissance de Nihon Hidankyo par le comité Nobel envoie un message fort en faveur du désarmement nucléaire et de la paix mondiale.