Afrique : La crise mortelle de la sécurité routière persiste

Malgré un parc automobile limité, l'Afrique affiche le taux de mortalité routière le plus élevé au monde. Infrastructures inadéquates et manque de volonté politique freinent les progrès.

2 octobre 2024, 08:23  •  57 vues

Afrique : La crise mortelle de la sécurité routière persiste

L'Afrique fait face à une crise de sécurité routière alarmante, avec un taux de mortalité disproportionné par rapport à son parc automobile. Selon le rapport 2023 de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), le continent africain enregistre 19,5 décès pour 100 000 habitants, le pire bilan mondial.

Jean Todt, envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU pour la sécurité routière, souligne une tendance à la hausse inquiétante. Contrairement aux autres régions, l'Afrique a connu une augmentation de 17% des décès routiers entre 2010 et 2021. Cette situation est d'autant plus préoccupante que l'Afrique n'abrite que 4% du parc automobile mondial, mais concentre 19% des décès routiers en 2023.

Les causes de cette crise sont multiples. Haileyesus Adamtei, expert en sécurité routière à la Banque mondiale, pointe du doigt les infrastructures inadéquates, particulièrement dans les zones urbaines. En effet, de nombreux pays africains conçoivent encore leurs routes principalement pour les véhicules motorisés, négligeant les piétons qui représentent un tiers des victimes de la route en Afrique.

"Il faut des rues mieux conçues, avec des trottoirs, une signalisation appropriée et des voies piétonnes, notamment autour des écoles."

Jean Todt affirme :

L'état des véhicules est également un facteur majeur d'insécurité. L'Afrique est le premier destinataire mondial de véhicules d'occasion, souvent âgés de plus de quinze ans et offrant peu de garanties de sécurité. Au Sénégal, par exemple, les accidents causés par des véhicules aux freins défaillants ou aux pneus usés sont fréquents.

Le manque de volonté politique pour faire appliquer les règles de sécurité routière est un obstacle supplémentaire. Au Sénégal, après un accident tragique ayant fait 42 morts en janvier 2023, le gouvernement a annoncé 22 mesures, mais la plupart n'ont jamais été mises en application.

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Malgré ce tableau sombre, certains pays africains prennent des initiatives encourageantes. Le Rwanda, par exemple, a interdit l'importation de véhicules de plus de 15 ans. Le Kenya a introduit des amendes sévères pour les infractions routières, allant jusqu'à 1000 dollars pour conduite en état d'ivresse. L'Afrique du Sud a lancé une campagne nationale "Arrive Alive" pour sensibiliser à la sécurité routière.

Les conséquences de cette crise vont au-delà des tragédies humaines. Jean Todt souligne que les accidents de la route coûtent en moyenne 4 à 5% du PIB aux pays africains, freinant considérablement leur développement économique.

Pour améliorer la situation, des actions concertées sont nécessaires. L'amélioration des infrastructures, le renforcement de l'application des lois, la sensibilisation du public et la modernisation du parc automobile sont autant de pistes à explorer. Comme le rappelle Jean Todt, "les accidents de la route ne sont pas une fatalité" et la sécurité routière devrait être une priorité pour les gouvernements africains.