Morbihan : plainte contre une ex-djihadiste pour maltraitance de ses enfants

Le conseil départemental du Morbihan accuse Emilie König, ex-recruteuse de l'EI, de violences envers ses trois enfants nés en Syrie. La plainte vise à reconnaître leur statut de victimes.

8 octobre 2024, 10:49  •  0 vues

Morbihan : plainte contre une ex-djihadiste pour maltraitance de ses enfants

Le conseil départemental du Morbihan a déposé une plainte contre Emilie König, une ancienne recruteuse de l'État islamique (EI), pour des actes présumés de violence psychologique et physique envers ses trois enfants. Cette action juridique, révélée le 3 octobre 2023, soulève des questions complexes sur les conséquences de la radicalisation sur les familles et la protection des mineurs.

Emilie König, originaire de Lorient et fille d'un gendarme, a quitté la France pour la Syrie en 2012, au début de la guerre civile qui ravage le pays depuis plus d'une décennie. Capturée par les forces kurdes en 2017, elle a été rapatriée en France en juillet 2022 et est actuellement incarcérée à Rennes, l'un des plus grands établissements pénitentiaires pour femmes du pays.

Ses trois enfants - un garçon de 9 ans et des jumelles de 7 ans - sont nés en Syrie et ont été rapatriés en janvier 2021. Ils ont été placés sous la tutelle du département du Morbihan, qui a la responsabilité de leur protection en vertu de la loi française sur la protection de l'enfance.

Selon Me Jean-Guillaume Le Mintier, avocat du département, les enfants auraient été témoins d'atrocités en Syrie. L'aîné aurait confié à son assistante sociale que sa mère lui avait appris à décapiter et à lancer des grenades. Ces révélations soulignent les défis considérables liés à la réinsertion des enfants nés dans les zones de conflit, qui peuvent souffrir de problèmes d'identité et de traumatismes profonds.

"On considère que la réparation et la reconstruction de ces enfants passent inéluctablement par la reconnaissance de leur statut de victimes"

Me Jean-Guillaume Le Mintier, avocat du département du Morbihan

La plainte, transmise au Parquet national antiterroriste (PNAT) le 19 septembre, fait état de troubles importants chez les enfants. À leur arrivée en France, ils auraient pensé que les couteaux ne servaient qu'à décapiter, illustrant l'ampleur de leur traumatisme. Cette situation met en lumière l'importance cruciale d'un soutien psychologique adapté pour ces mineurs exposés à la violence extrême.

La Convention internationale des droits de l'enfant, dont la France est signataire, protège les mineurs contre toute forme de violence. La démarche du conseil départemental vise à faire reconnaître officiellement le statut de victimes de ces enfants, une étape jugée essentielle pour leur reconstruction et leur compréhension des normes sociales.

Cependant, l'avocat d'Emilie König, Me Emmanuel Daoud, conteste ces accusations. Il affirme que sa cliente s'est battue pour protéger ses enfants et assurer leur bien-être physique et psychologique. Cette divergence de points de vue souligne la complexité des cas impliquant des familles touchées par la radicalisation.

Cette affaire s'inscrit dans un contexte plus large de gestion des retours de djihadistes et de leurs enfants. Depuis 2016, la France a rapatrié plus de 100 enfants de zones contrôlées par l'EI, posant des défis sociaux et juridiques considérables. La justice antiterroriste française, reconnue pour son expertise, est confrontée à la délicate tâche de concilier sécurité nationale et protection de l'enfance.

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Le cas d'Emilie König et de ses enfants illustre les conséquences dévastatrices du terrorisme sur les familles et soulève des questions éthiques sur la responsabilité parentale dans des contextes extrêmes. Alors que le PNAT examine la plainte, cette affaire pourrait établir un précédent important dans la manière dont la France traite les enfants de djihadistes, en reconnaissant leur statut unique de victimes tout en travaillant à leur réintégration dans la société française.