Zimbabwe : La controverse de l'abattage d'éléphants pour nourrir la population

Face à la sécheresse, le Zimbabwe envisage d'abattre 200 éléphants pour nourrir les populations vulnérables. Cette décision soulève des inquiétudes quant à la conservation de l'espèce et ses réelles motivations.

25 septembre 2024, 14:52  •  14 vues

Zimbabwe : La controverse de l'abattage d'éléphants pour nourrir la population

Dans un contexte de sécheresse sévère, le Zimbabwe se trouve confronté à un dilemme complexe : gérer une population croissante d'éléphants tout en luttant contre la famine. Le gouvernement a récemment proposé une solution controversée : abattre 200 éléphants pour nourrir les populations vulnérables.

Cette décision intervient alors que le pays fait face à une situation paradoxale. Contrairement à la tendance continentale, où la population d'éléphants de savane a diminué de 60% au cours des cinq dernières décennies, celle du Zimbabwe a presque doublé depuis les années 1980, passant de 50 000 à environ 100 000 individus, selon ZimParks, l'autorité de protection de la faune sauvage zimbabwéenne.

Le 11 septembre 2024, Sithembiso Nyoni, ministre de l'Environnement, a déclaré devant le Parlement :

"Le Zimbabwe compte plus d'éléphants que nos forêts ne peuvent en accueillir"

Déclaration du ministre de l'Environnement

Cette affirmation souligne les défis auxquels le pays est confronté en matière de gestion de la faune. Les éléphants, qui peuvent consommer jusqu'à 150 kg de nourriture par jour, exercent une pression considérable sur les écosystèmes locaux.

Cependant, cette proposition a suscité de vives réactions. Tennyson Williams, directeur Afrique de l'ONG World Animal Protection, a exprimé ses inquiétudes :

"Cette décision risque de relancer le braconnage et le commerce illégal de l'ivoire, sapant ainsi les progrès remarquables réalisés en matière de conservation de la faune sauvage"

Réaction de World Animal Protection

Ces préoccupations sont d'autant plus pertinentes que le braconnage pour l'ivoire reste une menace majeure pour les éléphants africains, malgré les efforts de conservation.

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La proposition du gouvernement soulève également des questions sur son efficacité réelle. Farai Maguwu, directeur du Centre for Natural Resource Governance, une association zimbabwéenne, remet en question la logique de cette décision :

"C'est une fausse solution, nous avons 6 à 7 millions de personnes qui ont besoin d'aide alimentaire, 200 éléphants ne changeront rien. Il faut être honnête, cette décision n'a rien à voir avec la population"

Critique du Centre for Natural Resource Governance

Il est important de noter que la viande d'éléphant n'est pas couramment consommée dans la plupart des cultures africaines. Bekezela Maplanka, responsable de l'opposition dans le district de Bulilima, exprime son étonnement face à cette proposition :

"Pour moi, ça n'a pas de sens. Personnellement je n'en ai jamais mangé et je n'ai jamais entendu parler de ça. Ce serait comme manger un lion…"

Réaction d'un responsable local

Cette situation met en lumière les défis complexes auxquels le Zimbabwe est confronté. Le pays doit trouver un équilibre entre la conservation de la faune, le développement économique et les besoins de sa population. Le tourisme lié aux éléphants est une source importante de revenus pour le Zimbabwe, et les éléphants jouent un rôle crucial dans le maintien des écosystèmes.

Des alternatives à l'abattage existent. Le Zimbabwe a participé à des programmes de translocation d'éléphants vers d'autres pays africains et a expérimenté des méthodes non létales pour contrôler la population, comme la contraception. Le pays a également mis en place des corridors pour faciliter les mouvements des éléphants entre les zones protégées.

La gestion des populations d'éléphants reste un sujet de débat constant entre conservationnistes et communautés locales. Alors que le Zimbabwe continue de plaider pour la levée de l'interdiction internationale du commerce de l'ivoire, il est crucial de trouver des solutions durables qui prennent en compte les besoins de tous les acteurs impliqués, tout en préservant cette espèce emblématique pour les générations futures.