Mosab Abu Toha : La voix poétique de Gaza résonne dans l'exil

Dans les ruines de l'hôpital Al-Shifa à Gaza, le 17 septembre 2024, se dresse un symbole poignant de la destruction qui a frappé cette bande côtière palestinienne de 365 km². C'est dans ce contexte que l'œuvre de Mosab Abu Toha, poète et professeur gazaoui, prend toute son importance.

En janvier 2009, alors âgé de 16 ans, Abu Toha est grièvement blessé lors d'un bombardement israélien sur Gaza. Cet événement tragique marque le début de son parcours littéraire. Après sa convalescence, il poursuit ses études, notamment aux États-Unis, et devient professeur d'anglais à Gaza.

En 2017, Abu Toha fonde une bibliothèque à Gaza, nommée en l'honneur d'Edward Said, intellectuel palestino-américain. Cette initiative culturelle est d'autant plus significative que la bibliothèque de son université a été détruite par un bombardement, illustrant les défis auxquels font face les institutions éducatives dans cette région.

La publication en 2022 de son premier recueil, "Ce que vous trouverez caché dans mon oreille", marque un tournant dans sa carrière. Ce livre, mêlant autobiographie et exploration de l'identité palestinienne, offre un aperçu unique de la vie à Gaza. Il aborde des thèmes universels tels que l'enfermement, l'exil et la mort omniprésente, reflétant la réalité quotidienne des 2 millions d'habitants de Gaza.

"Une lumière jaune me frappe./ Ma tête est comme ouverte en deux,/ c'est l'impression que j'ai./ (…) Pendant quelques instants, je me demande : "Comment peux-tu rester debout avec la tête coupée ?""

La situation d'Abu Toha a dramatiquement changé en novembre 2023, lorsqu'il a été arrêté et maltraité par l'armée israélienne alors qu'il tentait de fuir vers l'Égypte avec sa famille. Aujourd'hui exilé aux États-Unis, il continue de documenter la guerre à Gaza à travers les réseaux sociaux et des articles pour des publications prestigieuses comme le New York Times et le New Yorker.

Malgré l'exil, Abu Toha poursuit son travail poétique. Son prochain recueil, "Forest of Noise", prévu pour novembre 2024, rassemblera des poèmes écrits depuis le début de la guerre actuelle. Cette œuvre promet d'apporter un éclairage précieux sur les expériences récentes des Gazaouis, dans une région où 97% de l'eau est impropre à la consommation et où le taux de chômage est parmi les plus élevés au monde.

L'œuvre d'Abu Toha transcende le simple témoignage pour devenir une exploration profonde de l'identité palestinienne et de l'expérience humaine face à l'adversité. Sa poésie, ancrée dans la riche tradition littéraire palestinienne, offre au lecteur français une occasion rare de comprendre la réalité complexe de Gaza, au-delà des gros titres et des statistiques.