L'UE face au dilemme de la réglementation technologique

La Commission européenne adopte une stratégie contre le crime organisé, mais collabore avec les géants de la tech pour réglementer l'IA, malgré les risques. Cette approche soulève des questions sur l'efficacité de la régulation.

24 septembre 2024, 08:29  •  0 vues

L'UE face au dilemme de la réglementation technologique

En octobre 2023, la Commission européenne a adopté une nouvelle stratégie pour lutter contre le trafic de drogue et la criminalité organisée, considérés comme des menaces majeures pour la sécurité de l'Union européenne. Cette décision, prise il y a près d'un an, souligne l'engagement de l'UE à combattre ces fléaux qui représentent un marché criminel estimé à 30 milliards d'euros par an.

Cependant, une approche différente est adoptée pour réglementer la transformation numérique et l'intelligence artificielle (IA), malgré les risques importants qu'elles présentent. Contrairement à la lutte contre le crime organisé, les décideurs politiques collaborent étroitement avec les géants de la technologie tels que Meta, Alphabet, Amazon, Apple et Microsoft pour élaborer des réglementations.

Cette collaboration soulève des questions sur l'efficacité et l'impartialité de la régulation, d'autant plus que ces entreprises ont souvent fait preuve d'un manque d'éthique dans la poursuite de leurs profits. Il est important de noter que ces géants technologiques ont une influence considérable : Facebook compte plus de 2,9 milliards d'utilisateurs actifs mensuels en 2024, tandis que Google traite plus de 3,5 milliards de recherches par jour.

Les menaces posées par les systèmes numériques sont multiples et complexes. Elles incluent l'accroissement des inégalités mondiales, l'impact environnemental significatif (les centres de données consomment environ 1% de l'électricité mondiale), et les violations quasi constantes de la vie privée. La collecte et la vente de données personnelles sont devenues monnaie courante, malgré l'entrée en vigueur du RGPD en 2018.

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De plus, la manipulation algorithmique et la désinformation menacent le bon fonctionnement de la démocratie. L'exemple le plus frappant est celui de Cambridge Analytica, qui a recueilli des informations sur 87 millions d'utilisateurs de Facebook pour influencer l'élection présidentielle américaine de 2016 et le vote du Brexit au Royaume-Uni la même année.

Face à ces défis, l'UE a proposé l'AI Act en 2021, la première loi complète sur l'IA au monde. Cependant, la question demeure : cette approche collaborative avec les géants de la tech est-elle vraiment la plus appropriée pour protéger les citoyens et garantir une utilisation éthique de la technologie ?

"La réglementation de l'IA et de la transformation numérique nécessite une approche équilibrée, prenant en compte à la fois l'innovation et la protection des citoyens."

Extrait d'un rapport de la Commission européenne

Il est crucial de trouver un équilibre entre l'innovation technologique et la protection des droits fondamentaux. Avec un marché mondial de l'IA qui devrait atteindre 1 394,30 milliards de dollars d'ici 2029, les enjeux sont considérables. L'UE, fondée en 1993, se trouve à un carrefour crucial : elle doit décider si sa collaboration avec les géants de la tech est vraiment dans l'intérêt de ses citoyens ou si une approche plus indépendante et stricte est nécessaire pour façonner l'avenir numérique de l'Europe.