Les fausses oppositions en politique : au-delà du clivage banlieues-périphérie

La politique française s'appuie sur des oppositions simplistes, notamment entre banlieues et France périphérique. Une analyse approfondie révèle des problèmes communs aux catégories fragiles, transcendant ces divisions artificielles.

25 septembre 2024, 16:05  •  0 vues

Les fausses oppositions en politique : au-delà du clivage banlieues-périphérie

La politique française se nourrit souvent d'oppositions simplistes qui structurent le débat public. L'une des plus en vogue ces dernières années est celle qui oppose les banlieues à la France périphérique, créant un clivage artificiel entre les populations immigrées et les "petits Blancs". Cette dichotomie, popularisée par le mouvement des gilets jaunes et les travaux du géographe Christophe Guilluy, a gagné en importance dans le discours politique.

Cette opposition se manifeste à travers le spectre politique. À gauche, François Ruffin critique Jean-Luc Mélenchon pour son supposé abandon de "la France des bourgs". À droite, Les Républicains dénoncent les "milliards des banlieues". Le succès électoral du Rassemblement national semble valider cette théorie d'un clivage profond.

Cependant, une analyse plus approfondie révèle que cette opposition est largement artificielle. Les catégories les plus fragiles de la société française partagent en réalité des problèmes communs, indépendamment de leur localisation géographique. Parmi ces défis, on trouve un pouvoir d'achat insuffisant face à l'inflation, un taux de chômage élevé et une plus grande vulnérabilité aux effets du changement climatique.

La désindustrialisation, souvent évoquée par François Ruffin, a touché de manière similaire les petites villes, les bassins miniers et industriels de l'Est et du Nord, ainsi que les banlieues anciennement industrielles des grandes villes. Cette évolution a entraîné une diminution significative de la part des ouvriers dans la population active, passant de 39% en 1962 à environ 20% aujourd'hui.

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Il est important de noter que la composition de la classe ouvrière a toujours été diverse, incluant à la fois des Français de longue date et des immigrés récents. La part des immigrés dans la population française est passée de 7,4% en 1975 à 10,3% en 2021, reflétant les changements démographiques du pays.

La note de Terra Nova de 2011, intitulée "Gauche : quelle majorité électorale pour 2012 ?", a souvent été mal interprétée. Plutôt que d'abandonner le monde ouvrier, elle proposait une nouvelle approche pour comprendre les catégories populaires, en prenant en compte des caractéristiques personnelles telles que l'âge, le genre et l'origine, au-delà de la simple catégorie socioprofessionnelle.

"La vraie rupture, c'était avec l'analyse marxiste, qui réduisait les individus à leur position socio-économique, pas avec les cibles électorales de la gauche."

Extrait de la note Terra Nova (2011)

Cette approche reconnaît que la moitié des ouvriers et des employés sont des femmes, qu'une part importante est jeune, et que la plupart des minorités appartiennent aux milieux populaires. Elle offre ainsi une vision plus nuancée et complexe de la réalité sociale française.

En conclusion, plutôt que de se focaliser sur des oppositions artificielles, il est crucial de reconnaître les défis communs auxquels font face les catégories fragiles de la société française. Cette approche permettrait d'élaborer des politiques plus efficaces et inclusives, répondant aux besoins réels de la population, au-delà des clivages géographiques ou ethniques.