La montée des murs : un défi mondial pour la liberté de circulation

L'essor des barrières frontalières remet en question l'idéal d'un monde sans frontières. Damien Simonneau analyse ce phénomène croissant et ses conséquences sur les flux migratoires et les droits humains.

24 septembre 2024, 13:03  •  47 vues

La montée des murs : un défi mondial pour la liberté de circulation

Dans un monde jadis rêvé sans frontières, la réalité du XXIe siècle dessine un tableau bien différent. La prolifération des murs et des barrières à travers le globe témoigne d'une tendance lourde que le politologue Damien Simonneau qualifie de "frénésie planétaire". Cette évolution soulève des questions cruciales sur la liberté de circulation et les droits humains.

Le contrôle des flux migratoires est devenu un enjeu politique majeur, comme en témoigne la campagne présidentielle américaine de 2024 entre Kamala Harris et Donald Trump. Ce débat ne se limite pas aux États-Unis ; il s'étend à l'Union européenne, au Royaume-Uni et au Proche-Orient. La frontière entre les États-Unis et le Mexique, s'étendant sur environ 3 145 km, illustre l'ampleur de ce phénomène.

Damien Simonneau, maître de conférences à l'Institut national des langues et des civilisations orientales, identifie trois fonctions principales des murs :

  • Un outil militaire de défense territoriale
  • Un ensemble de technologies de pointe pour le contrôle (biométrie, drones, radars)
  • Un point de contrôle filtrant les circulations jugées désirables ou indésirables

Cette dernière fonction accentue les inégalités mondiales, comme le montre la construction de barrières en Europe, telles que la clôture de 175 km érigée par la Hongrie le long de sa frontière avec la Serbie en 2015.

L'auteur souligne les conséquences graves de "l'obsession du mur" :

  • Elle alimente les peurs et les fantasmes d'invasions migratoires
  • Elle entraîne un lourd bilan humain et entrave la liberté de circulation

Simonneau critique l'efficacité et le coût des murs, citant l'exemple du programme de surveillance frontalière américain SBInet, qui a coûté plus d'un milliard de dollars avant d'être abandonné. Il affirme que "les murs sont coûteux, largement inefficaces dans leur fonction de contrôle des mobilités et attentatoires aux droits des individus".

Son expérience personnelle en juillet 2009 à la frontière israélo-palestinienne l'a profondément marqué, illustrant l'absurdité des contrôles. La ligne verte, établie en 1949, reste un symbole de division, tout comme le mur de séparation israélien en Cisjordanie qui s'étend sur environ 708 km.

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Simonneau appelle à lutter contre les idéologies de repli et d'enfermement. Cependant, il est important de noter que la frontière peut aussi être perçue comme une porte, dont le degré d'ouverture est révélateur. L'absence totale de frontières peut paradoxalement créer d'autres types de murs, comme l'a montré l'histoire avec l'établissement du rideau de fer en Europe centrale et orientale après la révolution russe.

Pour approfondir cette réflexion, il serait intéressant d'étudier d'autres cas, comme la frontière chinoise ou les "murs de la paix" de Belfast en Irlande du Nord, qui séparent les communautés catholiques et protestantes. Ces exemples montrent que la construction de murs est un phénomène complexe qui dépasse les simples considérations de contrôle migratoire.

"Les murs sont coûteux, largement inefficaces dans leur fonction de contrôle des mobilités et attentatoires aux droits des individus"

Damien Simonneau

En conclusion, la multiplication des murs frontaliers reflète les défis contemporains liés à la gestion des flux migratoires et à la sécurité nationale. Cependant, elle soulève également des questions fondamentales sur les droits humains et la liberté de circulation dans un monde de plus en plus interconnecté.