Guyane : La lente restitution des terres aux peuples autochtones

En Guyane, la promesse d'attribuer 400 000 hectares aux peuples amérindiens reste lettre morte sept ans après. Cette situation met en lumière les défis de la reconnaissance foncière des autochtones dans ce département français d'outre-mer.

25 septembre 2024, 04:56  •  240 vues

Guyane : La lente restitution des terres aux peuples autochtones

Dans le vaste territoire amazonien de la Guyane française, une promesse faite aux peuples autochtones reste en suspens. Il y a sept ans, le gouvernement français s'engageait à attribuer 400 000 hectares de terres aux peuples amérindiens. Cependant, cette promesse n'a toujours pas été tenue, mettant en lumière les défis complexes liés à la reconnaissance des droits fonciers des populations autochtones dans ce département d'outre-mer.

La Guyane, plus grand département français avec ses 83 846 km², est un territoire unique où la forêt amazonienne couvre 96% de la superficie. Cette région abrite une biodiversité exceptionnelle, avec plus de 5 500 espèces de plantes, 700 espèces d'oiseaux et 180 espèces de mammifères. C'est dans ce contexte écologique riche que vivent les six peuples amérindiens de Guyane : les Kali'na, Lokono-Arawak et Palikur sur le littoral, ainsi que les Wayana, Teko et Wayampi dans l'intérieur forestier.

L'histoire de ces peuples est marquée par des épreuves tragiques. Dès le début de la colonisation au XVIIe siècle, les populations autochtones ont été décimées par les épidémies et les conflits avec les Européens. Ce n'est qu'après 1946 que des mesures de protection et un suivi médical ont permis un regain démographique. Aujourd'hui, on estime la population amérindienne entre 13 000 et 14 000 personnes, soit environ 4% des 300 000 habitants de la Guyane.

La question foncière reste au cœur des préoccupations. L'État français détient encore 94% des terres guyanaises, une situation héritée de la doctrine de la Terra nullius, formalisée par le décret du 15 novembre 1898. Ce n'est que dans les années 1980 que les premiers pas vers une reconnaissance foncière des Amérindiens ont été faits, sous l'impulsion d'anthropologues et de militants autochtones.

Image

Le 28 mars 2017, lors d'une manifestation historique à Cayenne, les représentants des six peuples amérindiens ont réclamé la "restitution aux peuples autochtones" de 400 000 hectares de terres de l'État. Cette demande a été rapidement acceptée par le gouvernement et inscrite dans l'accord de Guyane du 21 avril 2017. Pourtant, sept ans plus tard, cette promesse reste lettre morte, alors que la plupart des autres engagements de l'accord ont été tenus ou sont en bonne voie.

Cette situation met en lumière les défis complexes liés à la gestion du territoire guyanais. La Guyane, seul territoire continental de l'Union européenne en Amérique du Sud, fait face à des enjeux multiples. L'orpaillage illégal, cause majeure de déforestation, menace non seulement l'environnement mais aussi les modes de vie traditionnels des peuples autochtones. Le parc amazonien de Guyane, créé en 2007 et plus grand parc national de France et de l'Union européenne, tente de concilier protection de la biodiversité et respect des droits des populations locales.

La reconnaissance des droits fonciers des Amérindiens s'inscrit dans un contexte plus large de préservation de la diversité culturelle et écologique de la Guyane. Avec plus de 20 groupes ethniques différents et le créole guyanais parlé par environ 90% de la population, la Guyane est un territoire d'une richesse culturelle exceptionnelle. Cette diversité se reflète également dans des événements comme le Carnaval de Guyane, l'un des plus longs du monde.

La question de l'attribution des terres aux peuples autochtones reste donc un défi majeur pour l'avenir de la Guyane. Elle soulève des questions complexes sur la gestion durable des ressources, la préservation de la biodiversité et le respect des droits des populations autochtones. Alors que la Guyane connaît l'un des taux de croissance démographique les plus élevés de France, trouver un équilibre entre développement économique, préservation de l'environnement et reconnaissance des droits ancestraux des Amérindiens devient plus crucial que jamais.