Géants de la tech vs UE : Bataille sur la régulation de l'IA

Les grandes entreprises technologiques critiquent la réglementation européenne, suspendant le lancement de leurs assistants IA. Elles affirment que ces règles entravent l'innovation et la compétitivité de l'Europe.

25 septembre 2024, 03:03  •  0 vues

Géants de la tech vs UE : Bataille sur la régulation de l'IA

Dans un contexte de tension croissante entre les géants de la technologie et l'Union européenne, une trentaine d'entreprises du numérique ont lancé une offensive contre la réglementation européenne. Le 19 septembre 2024, ces entreprises ont publié une lettre ouverte accusant l'Europe de perdre sa compétitivité et son innovation, notamment dans le domaine de l'intelligence artificielle (IA).

Meta, la société mère de Facebook et Instagram, est à l'avant-garde de cette campagne. Son fondateur, Mark Zuckerberg, avait déjà cosigné une tribune fin août 2024 avec Daniel Ek, le PDG de Spotify, critiquant une régulation jugée trop complexe. Cette initiative s'inscrit dans un contexte plus large où l'UE a adopté des réglementations importantes comme le Digital Markets Act (DMA) en 2022 et le Règlement général sur la protection des données (RGPD) en 2018.

Image

La situation a pris une tournure plus sérieuse lorsque Meta a décidé de suspendre le lancement de son assistant IA, Meta AI, sur Instagram et Facebook dans l'UE. Cette décision fait suite à une interdiction de la CNIL irlandaise, basée sur le RGPD, qui empêche Meta d'utiliser les contenus publics de ses utilisateurs pour entraîner ses modèles d'IA sans leur consentement explicite.

Joëlle Pineau, vice-présidente chargée de la recherche en IA chez Meta, souligne l'importance d'entraîner les IA sur les langues et cultures européennes pour éviter une domination des modèles anglo-saxons. Elle argue que les données utilisées sont publiques et non des conversations privées.

De son côté, Apple, bien que moins offensif dans sa communication, a également suspendu le lancement de son assistant IA, Apple Intelligence, ainsi que d'autres fonctionnalités prévues pour l'iPhone 16 en Europe. L'entreprise invoque des "incertitudes réglementaires" liées au DMA, craignant de compromettre la confidentialité et la sécurité des données de ses utilisateurs.

Cette situation met en lumière le défi de l'UE pour équilibrer protection des consommateurs et innovation technologique. Avec ses 27 États membres et environ 450 millions de consommateurs, l'UE représente un marché crucial pour ces entreprises. Cependant, le concept de "souveraineté numérique" est devenu un enjeu majeur dans la politique européenne depuis 2020.

Il est intéressant de noter que d'autres pays, comme le Brésil et le Royaume-Uni, ont adopté des approches différentes. Le Brésil a mis en place sa propre loi sur la protection des données (LGPD) en 2020, tandis que le Royaume-Uni, ayant quitté l'UE en 2020, a plus de flexibilité dans sa réglementation.

Cette confrontation intervient alors que l'IA est devenue un domaine d'investissement majeur pour les grandes entreprises technologiques depuis 2010. La Commission européenne a proposé l'AI Act en 2021 pour réguler ce secteur en pleine expansion.

"L'Europe est devenue moins compétitive et innovante que d'autres régions et elle risque aujourd'hui de reculer encore dans l'ère de l'intelligence artificielle, en raison de décisions de régulation incohérentes"

Mark Zuckerberg, fondateur de Meta

Alors que la capitalisation boursière de Meta a dépassé 1 trillion de dollars en 2023, l'entreprise, comme ses homologues, se trouve confrontée à un dilemme entre expansion mondiale et conformité réglementaire. L'issue de cette bataille pourrait façonner l'avenir de l'innovation technologique en Europe et au-delà.