Découverte révolutionnaire : les plus anciens génomes d'Afrique du Sud reconstitués

Des chercheurs ont reconstitué les plus anciens génomes humains d'Afrique du Sud, vieux de 10 000 ans. Cette découverte éclaire l'histoire démographique de la région et révèle une stabilité génétique surprenante.

23 septembre 2024, 08:19  •  946 vues

Découverte révolutionnaire : les plus anciens génomes d'Afrique du Sud reconstitués

Une équipe de chercheurs a réalisé une percée scientifique majeure en reconstituant les plus anciens génomes humains d'Afrique du Sud à ce jour. Cette découverte, annoncée le 22 septembre 2024, offre un nouvel éclairage sur l'histoire démographique de la région et remet en question certaines hypothèses sur l'évolution génétique des populations humaines.

Les séquences génétiques proviennent des restes d'un homme et d'une femme découverts dans l'abri rocheux d'Oakhurst, près de la ville côtière de George. Victoria Gibbon, professeure d'anthropologie biologique à l'Université du Cap (UCT), a expliqué que ces individus ont vécu il y a environ 10 000 ans. Cette découverte repousse considérablement les limites de notre compréhension de l'histoire génétique de la région, les plus anciens génomes précédemment reconstitués ne remontant qu'à environ 2 000 ans.

L'abri rocheux d'Oakhurst, découvert en 1932, s'est révélé être une mine d'informations. Les chercheurs y ont reconstitué treize séquences génétiques de personnes ayant vécu entre 1 300 et 10 000 ans avant notre ère. Ce site, rare en Afrique du Sud, a permis de mieux comprendre les mouvements et les relations des populations locales sur une période de près de 9 000 ans.

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L'un des résultats les plus surprenants de cette étude est la similarité génétique entre les génomes les plus anciens et ceux des groupes San et Khoekhoe qui vivent actuellement dans la même région. Cette découverte suggère une stabilité génétique remarquable sur une période de 10 000 ans, contrastant fortement avec les résultats d'études similaires menées en Europe.

Joscha Gretzinger, auteur principal de l'étude et chercheur à l'Institut Max-Planck d'anthropologie évolutive de Leipzig, a souligné cette différence :

"Des études similaires menées en Europe ont révélé une histoire de changements génétiques à grande échelle dus aux mouvements humains au cours des 10 000 dernières années. Ces nouveaux résultats provenant d'Afrique australe sont très différents et suggèrent une longue histoire de stabilité génétique relative."

Comparaison avec les études européennes

Cette stabilité génétique n'a été interrompue qu'il y a environ 1 200 ans, lorsque de nouveaux arrivants ont introduit le pastoralisme, l'agriculture et de nouvelles langues dans la région. Ces innovations ont marqué le début d'interactions entre les nouveaux venus et les groupes de chasseurs-cueilleurs locaux, entraînant des changements génétiques plus récents.

La reconstitution de ces génomes anciens a été rendue possible grâce aux avancées technologiques récentes. Victoria Gibbon a expliqué à l'AFP que, bien que l'Afrique australe abrite certaines des plus anciennes traces d'hommes modernes, la conservation de l'ADN y est généralement médiocre. Les nouvelles technologies permettent désormais d'extraire et d'analyser cet ADN ancien, ouvrant de nouvelles perspectives pour la recherche.

Cette découverte s'inscrit dans un contexte plus large de recherche génétique en Afrique australe. Jusqu'à présent, moins de deux douzaines de génomes anciens ont été retrouvés dans la région, principalement au Botswana, en Afrique du Sud et en Zambie. En comparaison, des milliers de génomes anciens ont été reconstitués en Europe et en Asie.

L'importance de cette découverte ne se limite pas à l'histoire génétique. Elle offre également des informations précieuses sur l'évolution des modes de vie, des migrations et des interactions culturelles en Afrique australe. L'introduction du pastoralisme et de l'agriculture il y a 1 200 ans marque un tournant majeur dans l'histoire de la région, illustrant comment les innovations technologiques et culturelles peuvent influencer la composition génétique des populations.

Cette étude souligne l'importance de la recherche interdisciplinaire, combinant archéologie, génétique et anthropologie. Elle ouvre de nouvelles perspectives pour comprendre l'histoire complexe des populations humaines en Afrique et dans le monde entier, remettant en question nos hypothèses sur les modèles de migration et d'évolution génétique.