Brésil : La suspension de X maintenue, le pays s'adapte à la vie sans le réseau

Le juge brésilien confirme le blocage de X malgré les efforts du réseau. Les utilisateurs et influenceurs s'adaptent, transformant le pays en laboratoire d'une "vie sans X".

23 septembre 2024, 16:33  •  29 vues

Brésil : La suspension de X maintenue, le pays s'adapte à la vie sans le réseau

Le 21 septembre 2024, le juge Alexandre de Moraes du Tribunal suprême fédéral brésilien a confirmé la suspension du réseau social X au Brésil, malgré les efforts de la plateforme pour se conformer aux exigences légales. Cette décision prolonge une situation qui dure depuis près d'un mois, transformant le plus grand pays d'Amérique du Sud en un véritable laboratoire d'observation de la vie sans ce réseau social populaire.

X, anciennement connu sous le nom de Twitter et acquis par Elon Musk pour 44 milliards de dollars en octobre 2022, avait annoncé la veille la nomination d'un représentant légal dans le pays. Cependant, cette mesure a été jugée insuffisante par la justice brésilienne, qui a accordé cinq jours supplémentaires à la plateforme pour fournir des documents complémentaires.

Cette suspension s'inscrit dans un contexte plus large de lutte contre la désinformation et les "milices numériques" d'extrême droite au Brésil. Le pays, qui compte plus de 210 millions d'habitants, a connu des problèmes majeurs de désinformation sur les réseaux sociaux lors des élections récentes, ce qui a conduit à des discussions sur une loi contre les fake news depuis 2020.

L'impact de cette suspension est considérable pour les 22 millions d'utilisateurs brésiliens de X. Joao Victor Archegas, chercheur en droit à l'Institut de technologie et société de Rio de Janeiro, souligne :

Le Brésil est subitement devenu le laboratoire d'une "vie sans X"

Cette situation est particulièrement significative dans un pays où l'utilisation des réseaux sociaux est intense. Selon Kepios, une société de conseil spécialisée dans le numérique, un Brésilien passe en moyenne 3 heures et 37 minutes par jour sur les réseaux sociaux, soit environ 4,5 jours par mois.

Les influenceurs brésiliens, qui dépendent fortement de ces plateformes pour leur activité professionnelle, sont parmi les plus touchés. Babi Magalhaes, une avocate et publicitaire de 34 ans avec plus de 400 000 abonnés sur X, témoigne de son expérience :

C'est là qu'on apprenait [la tenue d'un] événement en premier, immédiatement, ou quelques minutes après qu'il s'était produit. Les autres plates-formes se contentaient de reproduire et d'amplifier la nouvelle

Magalhaes explique qu'elle se sent "sans emploi" depuis le blocage et qu'elle a du mal à s'adapter à d'autres plateformes comme Instagram, qui reposent davantage sur le contenu visuel.

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Cette situation met en lumière la dépendance croissante aux réseaux sociaux dans la société brésilienne, où le marketing d'influence est une industrie en pleine expansion. Elle soulève également des questions sur la liberté d'expression en ligne et le rôle des plateformes numériques dans le débat public, rappelant la période de censure des médias pendant la dictature militaire (1964-1985).

Alors que le Brésil navigue dans ces eaux inconnues, l'adaptation des utilisateurs à d'autres plateformes comme Threads et Bluesky reste limitée. Cette expérience unique pourrait avoir des implications importantes pour la compréhension de l'impact des réseaux sociaux sur la société et la démocratie, non seulement au Brésil mais dans le monde entier.