Atos : les actionnaires face à une dilution massive imminente

Atos, le géant français des services informatiques, se trouve à un tournant critique de son histoire. Les actionnaires du groupe, déjà ébranlés par une chute vertigineuse de 90% de la valeur de l'action depuis le début de l'année, sont confrontés à une décision cruciale qui pourrait sceller leur sort.

Le 27 septembre 2024, les actionnaires d'Atos se réuniront pour voter sur un plan de restructuration de la dette qui promet d'être douloureux. Ce plan prévoit de réduire leur participation à seulement 0,05% du capital, à moins qu'ils n'injectent 233 millions d'euros supplémentaires pour conserver 25,75% des parts. Cette situation met en lumière la gravité de la crise financière que traverse l'entreprise, autrefois fleuron de la technologie française.

Le contexte juridique ne joue pas en faveur des actionnaires. La réforme du droit des faillites de 2021 permet une "application forcée" de la procédure, limitant ainsi leur pouvoir de décision. Les créanciers, principalement des banques et des fonds d'investissement, sont appelés à devenir les nouveaux propriétaires majoritaires du deuxième groupe français de services informatiques, juste derrière Capgemini.

Cette restructuration marque la fin d'une période tumultueuse pour Atos. L'entreprise, fondée en 1997, a connu de nombreux rebondissements ces dernières années, incluant des projets de scission avortés, des discussions de vente infructueuses avec Airbus, et pas moins de quatre changements de directeur général. Ces turbulences ont considérablement affecté les performances de l'entreprise, conduisant à une dégradation significative de ses résultats financiers.

Malgré l'effacement d'environ 2,8 milliards d'euros de dette sur un total de 4,9 milliards, Atos fait face à de nouveaux défis financiers. Les 2 milliards restants ont été renégociés à des taux plus élevés, entre 5% et 9% par an. De plus, les nouveaux financements promis par les créanciers, bien que nécessaires, s'accompagnent de taux d'intérêt exorbitants allant de 10% à 13%.

La question qui se pose maintenant est de savoir si Atos, dont l'activité a été sévèrement impactée par ces mois de turbulences, sera en mesure de rembourser cette dette, même avec l'apport attendu de 700 millions d'euros provenant de la vente en cours de ses activités sensibles dans le domaine militaire et de la cybersécurité à l'État français.

"La restructuration soulage, mais ouvre paradoxalement d'autres défis, tout aussi compliqués."

Il est important de noter qu'Atos n'est pas seulement une entreprise en difficulté financière. C'est aussi un acteur majeur de l'innovation technologique en France et en Europe. L'entreprise est présente dans plus de 70 pays, emploie environ 110 000 personnes, et a réalisé un chiffre d'affaires de 11,3 milliards d'euros en 2022. Elle est reconnue pour ses compétences en matière de cloud computing, de cybersécurité et de supercalculateurs.

Atos a également joué un rôle crucial dans plusieurs domaines stratégiques. L'entreprise a été le partenaire informatique officiel des Jeux Olympiques et Paralympiques, a développé un programme de recherche en informatique quantique, et a contribué à des projets de transformation numérique pour de nombreuses entreprises du CAC 40. De plus, Atos s'est engagé dans des initiatives environnementales, visant à atteindre zéro émission nette de carbone d'ici 2028.

La restructuration d'Atos soulève donc des questions qui vont au-delà de la simple survie financière de l'entreprise. Elle concerne également l'avenir de l'expertise technologique française et européenne dans des domaines stratégiques tels que la cybersécurité, l'intelligence artificielle et le calcul haute performance.

Alors que les actionnaires se préparent à voter, l'avenir d'Atos reste incertain. La capacité de l'entreprise à surmonter ces défis financiers tout en maintenant son leadership technologique sera cruciale non seulement pour sa propre survie, mais aussi pour la position de la France dans le paysage technologique mondial.