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Retraites : nouvelles tentatives d'abrogation face à des obstacles majeurs

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Deux propositions de loi visent à annuler des aspects clés de la réforme des retraites de 2023. Malgré un soutien majoritaire, des obstacles politiques et juridiques menacent leur succès.

Un an et demi après la promulgation de la réforme des retraites en France, de nouvelles contestations émergent au sein du parlement. Deux propositions de loi, émanant du Rassemblement national (RN) et de La France insoumise (LFI), visent à supprimer certains aspects controversés de la réforme, notamment le report de l'âge légal de départ à 64 ans.

Ces initiatives s'inscrivent dans un contexte où le système de retraite français, basé sur le principe de répartition, fait face à des défis démographiques et financiers importants. Le ratio actifs/retraités est passé de 4 pour 1 en 1960 à environ 1,7 pour 1 aujourd'hui, exerçant une pression croissante sur le financement des pensions.

Les propositions de loi, prévues pour être débattues respectivement le 31 octobre et le 28 novembre 2024, bénéficient d'un soutien apparent de plus de 300 députés. Cependant, malgré cette majorité numérique, leur adoption reste incertaine en raison de divergences politiques et d'obstacles juridiques.

Sur le plan politique, la gauche, bien qu'opposée à la réforme, pourrait ne pas soutenir la proposition du RN. Le Parti socialiste a déjà annoncé qu'il ne voterait pas en faveur de ce texte. Cette situation illustre les complexités du paysage politique français et les défis de l'opposition pour présenter un front uni.

L'obstacle juridique le plus significatif réside dans l'article 40 de la Constitution française. Selon Emilien Quinart, maître de conférences en droit public à l'université Paris-I Panthéon-Sorbonne, cet article rend irrecevables les propositions parlementaires qui aggraveraient les charges publiques. Or, l'abrogation du report de l'âge légal de départ entraînerait inévitablement une augmentation des dépenses de l'État.

Il est important de noter que la France consacre déjà environ 14% de son PIB aux retraites, l'un des taux les plus élevés parmi les pays de l'OCDE. La réforme de 2023 visait à équilibrer le système d'ici 2030, face à un déficit estimé à 13,5 milliards d'euros en 2020.

Ces débats s'inscrivent dans une longue histoire de réformes des retraites en France. Depuis la première loi sur les retraites ouvrières et paysannes de 1910, le système a connu de nombreuses évolutions. L'âge légal de départ, fixé à 60 ans en 1982, a été progressivement relevé, reflétant l'augmentation de l'espérance de vie qui atteint aujourd'hui environ 23 ans pour les femmes et 19 ans pour les hommes à 65 ans.

Malgré ces défis, le système de retraite français reste l'un des plus généreux de l'OCDE, avec un taux de remplacement moyen d'environ 75%. Il inclut également des dispositifs de solidarité comme le minimum vieillesse et offre des options telles que la retraite progressive à partir de 60 ans sous certaines conditions.

En conclusion, bien que les propositions d'abrogation bénéficient d'un soutien parlementaire significatif, leur succès reste incertain face aux obstacles politiques et constitutionnels. Ces débats reflètent les tensions persistantes autour de la réforme des retraites et soulignent la complexité de trouver un équilibre entre durabilité financière et protection sociale en France.

Nicolette Mathieu

Économie