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Retards et incertitudes pour les grands projets industriels allemands

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Les reports et annulations de projets industriels majeurs en Allemagne soulèvent des inquiétudes quant à la stratégie de modernisation du pays. L'avenir de plusieurs investissements clés dans les secteurs technologiques est remis en question.

L'industrie allemande traverse une période d'incertitude, marquée par des retards et des remises en question de projets majeurs. Le report de l'ouverture de la gigafactory d'Intel à Magdebourg, initialement prévue pour 2027, illustre cette tendance préoccupante.

Le géant américain des semi-conducteurs a annoncé un délai de deux ans pour son projet phare en Saxe-Anhalt, jetant une ombre sur la politique industrielle du gouvernement d'Olaf Scholz. Cet investissement de plus de 30 milliards d'euros, soutenu par 9,9 milliards d'euros de fonds publics, devait créer 3 000 emplois et établir un centre de compétences de haute technologie dans l'une des régions les plus défavorisées du pays.

Ce report s'inscrit dans un contexte plus large de difficultés pour l'industrie allemande. Volkswagen, le plus grand constructeur automobile du pays fondé en 1937, fait face à des manifestations d'employés inquiets pour l'avenir de leurs sites de production. L'industrie automobile, qui représente environ 5% du PIB allemand et emploie directement plus de 800 000 personnes, est particulièrement touchée par ces incertitudes.

D'autres projets ambitieux sont également menacés. Dans la Sarre, région frontalière avec la France, la construction d'une usine de semi-conducteurs par l'américain Wolfspeed et l'équipementier allemand ZF est repoussée. Ce projet symbolisait la transition industrielle d'une région autrefois dominée par l'industrie charbonnière et sidérurgique.

À Kaiserslautern, en Rhénanie-Palatinat, un projet d'usine de batteries porté par Mercedes, TotalEnergies et Stellantis a été gelé en juin 2024, malgré des subventions promises de 437 millions d'euros. Cette décision reflète les incertitudes sur la demande dans le secteur automobile.

"Ces projets sont essentiels pour la modernisation de notre industrie et notre souveraineté technologique. Nous devons redoubler d'efforts pour les concrétiser."

Déclaration du ministre de l'Économie et du Climat, Robert Habeck

Le projet du suédois Northvolt à Heide, dans le Schleswig-Holstein, suscite également des inquiétudes. Malgré une cérémonie de pose de la première pierre en mars 2024 et un soutien gouvernemental de 900 millions d'euros, l'entreprise a annoncé des réductions de coûts et la fermeture d'une usine, remettant en question la faisabilité du projet allemand.

Ces difficultés surviennent alors que l'Allemagne, quatrième producteur automobile mondial et plus grand marché automobile d'Europe, s'efforce de maintenir sa compétitivité tout en poursuivant ses objectifs de transition énergétique. Le pays vise la neutralité carbone d'ici 2045, dans le cadre de sa politique "Energiewende" initiée dans les années 2000.

La situation actuelle soulève des questions sur l'efficacité des investissements publics massifs dans ces projets industriels. Alors que l'Allemagne cherche à moderniser son industrie et à assurer sa souveraineté dans des secteurs clés comme les semi-conducteurs et les batteries, ces revers pourraient nécessiter une réévaluation de sa stratégie industrielle.

L'avenir de ces projets reste incertain, mais leur importance pour l'économie allemande et la transition vers une industrie plus durable est indéniable. Le gouvernement et les industriels devront trouver des solutions innovantes pour surmonter ces obstacles et maintenir la position de l'Allemagne en tant que puissance industrielle de premier plan.

Angelique Labbé

Affaires