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Procès de François Thierry : L'ex-chef de l'OCRTIS face à la justice

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L'ancien commissaire François Thierry comparaît à Lyon pour faux en écriture et destruction de preuves. L'affaire révèle des irrégularités dans la surveillance du trafic de drogue.

Le procès de François Thierry, ancien chef de l'Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (OCRTIS), s'ouvre aujourd'hui devant la cour criminelle du Rhône à Lyon. Âgé de 56 ans, Thierry fait face à des accusations graves de faux en écriture publique et destruction de preuves, des infractions considérées comme criminelles en raison de son statut d'agent de l'autorité publique.

L'affaire remonte à avril 2012, lorsque Thierry, alors à la tête de l'OCRTIS, a obtenu l'autorisation d'extraire Sofiane Hambli de sa prison à Nancy. Hambli, considéré comme l'un des plus importants importateurs de cannabis en France, purgeait une peine de 13 ans pour trafic de stupéfiants. Il était également devenu l'informateur privilégié de Thierry, jouant un rôle clé dans le dispositif Myrmidon, une opération de surveillance des importations massives de stupéfiants.

L'extraction d'Hambli était officiellement justifiée par une garde à vue supervisée par la section C2 du parquet de Paris, une juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) chargée de la grande criminalité. Cependant, les enquêteurs soupçonnent que cette garde à vue était fictive et liée à une opération de livraison surveillée de cannabis en Espagne.

Cette opération, qui s'est déroulée à Estepona, impliquait le débarquement de six tonnes de cannabis sur une plage. La drogue a ensuite été transférée dans une villa louée et surveillée par Hubert Avoine, un autre informateur de Thierry inscrit au Bureau central des sources (BCS).

L'affaire a pris une nouvelle dimension en octobre 2015, lorsque les douanes françaises ont découvert sept tonnes de cannabis boulevard Exelmans à Paris, importées d'Espagne dans des circonstances similaires. Cette découverte a déclenché une enquête plus approfondie sur les méthodes de l'OCRTIS et le dispositif Myrmidon.

Hubert Avoine a joué un rôle crucial en dénonçant l'épisode espagnol à la justice. Dans son livre "L'Infiltré", co-écrit avec le journaliste Emmanuel Fansten et publié en 2017, Avoine accuse François Thierry d'avoir organisé la logistique de l'opération bien au-delà des nécessités du service.

L'enquête a révélé que l'extraction de Sofiane Hambli était directement liée à l'opération d'Estepona. Depuis sa chambre d'hôtel, Hambli se faisait passer pour le commanditaire auprès des fournisseurs marocains, tandis que les policiers suivaient le transfert de la drogue pour identifier la chaîne des acheteurs.

Cependant, la justice estime que seulement 1,9 tonne sur les 6 tonnes débarquées en Espagne et acheminées en France ont été saisies. Le juge Michel Noyer, dans son ordonnance de renvoi, qualifie cela de "faille majeure" dans le dispositif Myrmidon.

Cette affaire soulève des questions importantes sur les méthodes utilisées dans la lutte contre le trafic de drogue en France. Elle met en lumière les défis de la coopération internationale, l'utilisation d'informateurs, et les risques potentiels associés aux opérations de livraison surveillée.

Le procès de François Thierry devrait apporter un éclairage nouveau sur ces pratiques et pourrait avoir des implications significatives pour l'avenir de la lutte contre le trafic de stupéfiants en France et en Europe.

Nicolette Mathieu

Politique