Dans le cadre du projet France 2030, Marseille, deuxième ville la plus peuplée de France, a lancé une initiative audacieuse pour moderniser son système éducatif. Le 4 avril 2023, des écrans numériques interactifs ont été installés à l'école Merlan-Village, marquant le début d'une nouvelle ère pour l'éducation numérique dans la cité phocéenne.
La coalition de gauche, citoyenne et écologiste, au pouvoir depuis juin 2020, a fait de la rénovation des écoles une priorité. Avec un budget colossal de près de 1,5 milliard d'euros, la municipalité s'est engagée à rénover 188 établissements scolaires en dix ans. Parallèlement, un "grand plan numérique des écoles" a été élaboré pour les 470 écoles primaires et maternelles de la ville.
Ce plan, voté en avril 2021 et réajusté en juillet 2023, s'inscrit dans une démarche plus large visant à maîtriser l'utilisation, le coût et l'impact des nouvelles technologies à l'échelle communale. En avril 2023, Marseille a adhéré à la charte des bonnes pratiques de l'Institut du numérique responsable, démontrant son engagement envers une approche éthique et durable du numérique.
Christophe Hugon, conseiller municipal délégué au numérique, explique : "Cette charte repose sur quatre piliers : la sécurité, la sobriété environnementale comme financière, l'accessibilité et l'éthique... Autant d'axes que nous déclinons dans les écoles." Cette approche unique a été saluée par Dorie Bruyas, directrice de l'association Fréquence écoles, qui souligne l'engagement fort des responsables politiques marseillais sur la question du numérique dans l'éducation.
Contrairement à d'autres initiatives, Marseille a choisi de ne pas doter chaque élève d'un appareil personnel. Pierre Huguet, adjoint aux écoles, explique : "En primaire, nous avons décidé de privilégier une utilisation non permanente et encadrée par les enseignants. C'est à eux de juger de l'intérêt pédagogique du numérique en fonction des activités."
Pour permettre cette utilisation ponctuelle, chaque école élémentaire est équipée depuis 2023 d'au moins une "classe numérique mobile" : un chariot contenant seize tablettes et un poste pour l'enseignant, donnant accès à près de 2 000 ressources pédagogiques. À la rentrée 2024, 7 531 tablettes seront disponibles pour 40 000 élèves de primaire, avec un objectif de plus de 8 500 tablettes d'ici 2026.
Cette approche progressive et réfléchie du numérique dans l'éducation s'inscrit dans l'histoire riche de Marseille, ville fondée vers 600 av. J.-C. et qui a toujours su se réinventer. De la même manière que le Vieux-Port, l'un des plus anciens de Méditerranée, a évolué au fil des siècles, le système éducatif marseillais s'adapte aux défis du 21e siècle.
"L'idée, c'est de former avant d'équiper. On ne veut pas que les élèves baignent trop dans le numérique, mais qu'ils entrent au collège en maîtrisant d'autres usages que ceux des réseaux sociaux."
Cette initiative s'inscrit dans une dynamique plus large de modernisation de la ville, qui a vu la réintroduction du tramway en 2007 après 53 ans d'absence, et l'ouverture du Mucem, premier musée national situé en dehors de Paris. Tout comme la basilique Notre-Dame-de-la-Garde veille sur la ville depuis 1864, ce plan numérique vise à guider les jeunes Marseillais vers un avenir où la technologie est maîtrisée et utilisée à bon escient.