Le pape François s'apprête à effectuer une visite historique en Belgique, intitulée "En route avec espérance", du 26 au 29 septembre 2024. Cette visite, initialement prévue pour célébrer le 600e anniversaire de l'Université catholique de Louvain, revêt une importance particulière dans le contexte des récentes controverses au sein de l'Église catholique belge.
L'Université catholique de Louvain, fondée en 1425, est l'une des plus anciennes institutions d'enseignement supérieur en Europe. En 1968, elle a été scindée en deux entités distinctes suite à des manifestations d'étudiants nationalistes flamands, reflétant les complexités linguistiques et culturelles de la Belgique. Ce pays compte en effet trois communautés linguistiques officielles : néerlandaise, française et allemande.
La visite papale est particulièrement attendue par les victimes d'agressions sexuelles au sein de l'Église catholique belge. Le 5 septembre 2024, plusieurs d'entre elles ont adressé une lettre au pape, demandant la reconnaissance de leur souffrance et la mise en place de mesures préventives. Une rencontre entre François et quinze victimes est prévue le 27 septembre, dans un lieu tenu secret pour favoriser un "échange authentique".
La Conférence des évêques de Belgique, créée en 1967, reste discrète sur les modalités de cette rencontre. Cette attitude suscite des critiques, notamment de la part du prêtre flamand Rik Devillé, fondateur du groupe Droits humains dans l'Église il y a plus de 30 ans. Il déplore le manque de transparence et estime que le pape devrait prendre des mesures concrètes contre les auteurs d'abus.
La visite papale intervient également dans le contexte d'un scandale d'adoptions forcées révélé en décembre 2023. Au moins 30 000 bébés auraient été enlevés à de jeunes mères célibataires et vendus à des parents adoptifs entre l'après-guerre et le début des années 1980. Ce scandale met en lumière les pratiques controversées de certaines institutions religieuses.
La Belgique, l'un des pays fondateurs de l'Union européenne en 1957, a connu d'importantes évolutions sociétales ces dernières décennies. Le pays a été parmi les premiers à légaliser l'euthanasie en 2002 et le mariage homosexuel en 2003. Parallèlement, la pratique religieuse catholique a considérablement diminué, passant d'environ 80% dans les années 1960 à moins de 50% aujourd'hui.
Le point culminant de la visite sera une messe au stade Roi-Baudouin le dimanche 29 septembre. Ce stade, d'une capacité d'environ 50 000 spectateurs, symbolise l'importance de l'événement pour la communauté catholique belge.
"Le pape connaît déjà tous ces dossiers. Il serait bon qu'il punisse plutôt les auteurs et qu'il prenne les plaintes au sérieux"
L'affaire de Joël Devillet, qui a publié en 2009 un livre révélant les abus qu'il avait subis, illustre les défis auxquels l'Église est confrontée. Son cas met en lumière la gestion problématique des abus par les autorités ecclésiastiques, y compris l'ancien primat de Belgique, André-Joseph Léonard.
Cette visite papale s'annonce donc comme un moment crucial pour l'Église catholique en Belgique, confrontée à la nécessité de répondre aux attentes des victimes tout en naviguant dans un paysage social et religieux en pleine mutation.